n a beaucoup parlé ces derniers jours des Pays-Bas. Qualifié de « frugaux », les Néerlandais sont traditionnellement réputés comme précautionneux en matière d’argent, et pendant longtemps, ce trait de caractère s’est exprimé aussi dans le domaine des vins. « Tout comme leurs voisins allemands et belges, les consommateurs de vin aux Pays-Bas ont du mal à considérer le vin comme un produit de qualité supérieure », confirme l’analyste britannique Wine Intelligence dans une étude récente. « Pendant de nombreuses années, l'idée de dépenser 5 euros ou plus pour une bouteille de vin au supermarché était considérée comme un comportement occasionnel et inhabituel ». Mais voilà que, à l’instar de nombreux pays dans le monde, la tendance à boire moins mais mieux s’y installe durablement. Pour des repas informels, une occasion de consommation clé, les consommateurs néerlandais déclarent dépenser en moyenne 5,49 € par bouteille, contre 4,53 € en 2014, soit une hausse de 21%, selon Wine Intelligence. Dans le même temps, les volumes et fréquence de consommation ont diminué, les ventes annuelles se chiffrant actuellement à 39 millions de caisses, d’après des données publiées par Wine Australia.
Pour faire face à la pandémie, les Pays-Bas ont fermé, entre autres, les bars et les restaurants. Mais selon Wine Intelligence, une grande partie des pertes liées à cette fermeture a été compensée par les circuits de ventes pour la consommation à domicile, dont le commerce électronique, principal bénéficiaire de ce report. Si les volumes consommés ont globalement accusé une légère baisse, reflétant la tendance de fond, les valeurs se sont maintenues. Plus généralement, les Néerlandais semblent se calquer de plus en plus sur les tendances mondiales en matière de consommation. Ainsi, les effervescents y sont de plus en plus appréciés, en partie grâce à une réduction des accises instaurée en 2017. Depuis 2015, les bulles voient leur consommation évoluer favorablement (+12%), le marché étant dominé par le Prosecco qui détient 55% des volumes. Néanmoins, Wine Intelligence pointe l’augmentation de 22% de la consommation de Cava depuis 2017, l’attribuant à la baisse des accises.
Comme dans d’autres pays, le vin subit la concurrence d’autres boissons alcoolisées : la bière, la vodka et le gin sont montés en puissance depuis 2014, le gin étant particulièrement prisé. Une tendance qui paraît paradoxale au moment où les Néerlandais se préoccupent davantage de leur santé et de leur consommation d’alcool : le nombre de personnes qui citent la teneur en alcool comme un critère d’achat important ou très important est passée de 22% en 2014 à 31% en 2020. « Ce changement d’attitude semble concerner les consommateurs âgés de moins de 35 ans, ce qui laisse entendre que cette tendance touchera le marché pendant un certain temps », note l’analyste. Enfin, s’il est encore trop tôt pour mesurer l’impact durable de la crise du Covid-19, le commerce électronique semble être voué à un bel avenir, de même que la premiumisation. « Le consommateur néerlandais n’a pas la réputation d’être dépensier dans le domaine du vin, mais il commence à l’appréhender comme un produit auquel il peut consacrer un budget plus important - tout en en achetant moins ».