ors du colloque « Comment relever le défi de la transition écologique au vignoble », que l’IFV a organisé à Colmar (Haut-Rhin) le 21 mars, Eric Chantelot a marqué les esprits. Le directeur de l’IFV pôle Rhône Méditerranée et expert Ecophyto national a expliqué qu’il était probable que tous les produits à base de cuivre soient ré-homologués par l’Anses « avec systématiquement une ZNT de 50 m ». Et de poursuivre « Il est aussi fort probable que l’ensemble des ré-homologations incluent l’obligation du port d’un EPI pour les travailleurs qui interviennent dans les vignes traitées avec du cuivre même au-delà du délai de rentrée et sans limitation de durée, c’est-à-dire jusqu’aux vendanges ». Les réactions dans la salle ont été telles qu’il a eu du mal à poursuivre son intervention.
Et, ce n’est pas tout. Il a aussi précisé qu'il n'était pas certain que l'on puisse faire du lissage avec tous les cuivres. En effet, pour que leur produit puisse permettre un lissage, il faut que les firmes prouvent à l’Anses que celui-ci n’a pas d’effet sur les écosystèmes lorsqu’il est utilisé à plus de 4 kg. « Or il y a très peu d’études qui existent », a indiqué Eric Chantelot. Sachant que les firmes ont jusqu’au 30 mars pour déposer à l’Anses leur dossier de demande de ré-examen de leurs différentes préparations à base de cuivre, on comprend que cela va s’avérer très compliquée pour elles de répondre à cette exigence.
Concernant le glyphosate, l’expert a été clair : « Il y a une forte pression sur la matière active. Il faut envisager l’avenir sans. Le gouvernement a confirmé sa volonté d’en sortir au 31 décembre 2020 même s’il existe une marge de manœuvre dans les vignobles à forte pente. Dans ce contexte, il a missionné l’Anses pour qu’elle évalue chaque usage et interdise ceux pour lesquels il existe des alternatives. L’agence a donc demandé aux sociétés détentrices d’AMM de soumettre leurs dossiers avant le 30 juin 2019. Mais beaucoup ne veulent plus engager de frais pour soutenir leurs spécialités commerciales. 132 produits ont ainsi vu leur AMM non renouvelée fin 2018 ».
Pour finir, l’expert a expliqué que l’Anses avait récemment rendu une saisine sur la protection des abeilles. Dans cet avis, l’Agence recommande tout bonnement « d’élargir l’interdiction d’appliquer des produits insecticides et acaricides en pulvérisation pendant les périodes de floraison et/ou périodes de production d’exsudats : à l’ensemble des produits phytopharmaceutiques utilisés en pulvérisation pendant ces périodes, et à tous les produits contenant des substances actives systémiques utilisés en pulvérisation et traitements de semence avant floraison, y compris les produits à base de micro-organismes ».
Après toutes ces explications, on comprend que recourir à des produits phytos pour protéger les vignes va s’avérer un vrai casse-tête. « C’est un tableau un peu dramatique mais qui résume bien les enjeux », a conclu Eric Chantelot.
Lors de son intervention, Eric Chantelot a aussi évoqué les conséquences de l’augmentation de la RPP (Redevance pour pollution diffuse). « Sur huit programmes types régionaux, la hausse de la RPD est de 40 %, soit un coût moyen de 35 €/ha en 2019, avec des variations de 11 à 65 €/ha selon les régions et le recours ou non à des produits CMR ». Sans compter qu’avec la loi Egalim, depuis le 1er janvier, les distributeurs ne peuvent plus faire de rabais, remises et ristournes (3R) pour les produits phytos (hors biocontrôle, substance de base et produits à faible risque), a rappelé Eric Chantelot. L’expert a également expliqué que la séparation de la vente et du conseil, allait aussi engendrer des coûts supplémentaires. Le projet de texte prévoit en effet l’obligation d’un conseil stratégique et indépendant au moins deux fois tous les cinq ans. Un conseil dont le financement sera à la charge du viticulteur.