ne fois n'est pas coutume, la Provence a connu cette année une très forte pluviométrie entre mai et juin, puis en août, accompagnée d'attaques de mildiou d'une violence inédite. « La campagne viticole a été très compliquée en terme de gestion du mildiou », confirme Valentin Rubio, directeur technique du domaine la Suffrene (Bandol, Var), qui estime avoir été plutôt préservé, avec 14% de perte de récolte.
La grêle a également sévi dans le Var à plusieurs reprises, le 24 juin et en août. Certaines parcelles ont ainsi enregistré de grosses pertes. Mais dans les secteurs préservés, là où il n'y a eu ni l'un ni l'autre, la récolte est très pleine, voire excessive, grâce à une très belle sortie de grappes au printemps.


Les maturités sont en conséquence elles-aussi très disparates, les vignes peu « chargées » étant arrivées à maturité sans problème, atteignant parfois les 14°, tandis que celles avec une végétation très attaquée ou portant beaucoup de grappes ont plus de mal à mûrir. Gonflées de jus et fragilisées, elles sont exposées au risque de pourriture grise ou acide. Pour celles-ci, « il ne faut pas attendre; elles sont donc récoltées sans forcément attendre les degrés et enrichies, poursuit le professionnel. Cette année, on ne récolte pas selon le degré, mais à l'état sanitaire », résume t'il. « Les parcelles touchées par le mildiou ont des maturités très hétérogènes, à cause de l'arrêt plus précoce de l'activité photosynthétique », indique de son côté Valentin Rubio.
Globalement, les raisins destinés aux rosés, dont la cueillette se poursuit encore actuellement, sont donc cueillis à des degrés inférieurs à ceux de l'an dernier, « autour de 12,5° - 13°, contre 13,5-14° en 2017 » et parfois sous les degrés minimaux d'appellation, pour les cépages plus tardifs ; les vignes connaissent désormais une période de ralentissement des maturations, « logique » à cette période. Les vins rosés de ce millésime devraient en conséquence être moins gras et plus aromatiques que l'an passé.
Pour la récolte des raisins destinés aux vins rouges, la situation est plus compliquée, avec des maturités phénoliques qui peinent elles-aussi à être atteintes et « des potentiels couleurs faibles et beaucoup plus bas qu'en 2017, quels que soient les cépages », indique l'ICV dans son dernier bulletin. Leur récolte doit donc encore attendre, à l'image du domaine la Suffrene, qui récoltera probablement ses Mourvèdre la semaine prochaine si les contrôles de maturités phénoliques sont enfin bons.
« 2018 n’est sans doute pas le millésime le plus facile pour élaborer des vins rouges haut de gamme, mais l’expérience prouve qu’en choisissant des parcelles à faible charge que l’on laisse mûrir, nous arrivons à des niveaux de maturité phénolique intéressants », explique l'ICV. « Si 2017 était une année de rêve pour les rouges, ce ne sera pas le cas de 2018, qui sera moins bien », confirme à ce propos Olivier Nasles.