La vocation du négociant, c’est de faire un produit à façon, selon la demande des clients » résume Stéphane Michelet, le responsable qualité du site Castel de Blanquefort, lors d’une visite ce 3 août. Avec un outil industriel conditionnant 115 millions de cols en 2016, le groupe bordelais doit relever un véritable défi d’organisation pour arriver à concrétiser cette philosophie de la personnalisation à une échelle tendant vers la standardisation. Le site de Blanquefort embouteille en effet 500 à 600 000 cols par jour, sous 25 à 30 références différentes. Les onze lignes d’embouteillage du site* pouvant conditionner 2 500 étiquettes différentes.
Le challenge est d’autant plus complexe que le négociant s’est fixé un objectif de rapidité assez conséquent : un lot de vin en vrac arrivant sur le site doit pouvoir en repartir embouteillé une semaine plus tard. Ce qui laisse peu de temps alors que le vin doit être analysé, stabilisé, assemblé, conditionné…
« On reçoit les vins bruts, qui ne sont pas préparés pour la mise, afin de mieux les conserver et d’en maîtriser les caractéristiques. Et de pouvoir réaliser des parcours œnologiques différents » explique Stéphane Michelet, précisant qu’« il faut s’adapter aux exigences des clients tout en promouvant la marque ». Les opérations de filtration et de stabilisation sont globalement adaptées selon trois destinations : le marché français (78 % des volumes), l’export et le cas très particulier du Japon.
Contrairement aux autres marchés, l’électrodialyse est ainsi utilisée pour la stabilisation tartrique des vins destinés au Japon. « Le consommateur japonais n’est pas habitué aux précipités de cristaux tartriques. Ne pas stabiliser un vin, c’est prendre le risque d’une plainte pour tentative d’empoisonnement… » rapporte, pince-sans-rire, Stéphane Michelet. Résultat, quand un lot est conditionné pour le Japon, le personnel mobilisé sur la chaîne d’embouteillage est doublé, passant à huit pour s’assurer d’un résultat irréprochable (avec une caméra 3D en renfort pour vérifier le bon alignement des étiquettes).
Mais le niveau d’exigence est avant tout fixé par les cahiers des charges des clients, s’ajoutant aux certifications BRC, IFS et ISO 14 001 (pour cette dernière, dans le cadre du Système de Management Environnemental des vins de Bordeaux). Entre plan d’analyses et audits surprises, les marges de manœuvre sont très faibles pour assurer la qualité des lots. Les degrés de liberté sont également réduits pour respecter les profils produits, nécessitant un approvisionnement au cordeau.
« Les années difficiles, il faut chercher plus pour trouver du vin » reconnaît Isabelle Coustou, la responsable vin du site Castel Blanquefort. Assurant en moyenne la moitié des apports du négociant, les contrats avec des vignerons bordelais servent de socle fort à l’approvisionnement de Castel. Mais en cas d’aléas climatiques, comme cette année avec le gel, les enjeux de sourcing sont exacerbés. S’étant animées en juillet, les transactions vrac de Bordeaux sont actuellement bloquées : « la propriété fait logiquement un peu de rétention de volumes. Lorsque les premières vendanges seront rentrées, on aura une idée des rendements et des 2016 seront débloqués » analyse Isabelle Coustou. La quinzaine de courtiers déployés avec expertise Castel ont du travail pour approvisionner le négociant, et ses marques Baron de Lestac, Malesan…
* : Sept lignes sont dédiées aux bouteilles en verre (des 37,5 centilitres aux magnums, avec deux lignes adaptables pour PET), deux lignes exclusivement PET (0,25 litre, 1 L et 1,5 L), une ligne BIB (de 2,25 à 8 L) et une ligne pour petits contenants atypiques (18,7 cl et 25 cl, en verre ou PET). Cette dernière constituant la spécialité du site de Blanquefort au sein du groupe Castel.
Site de d’élevage, de préparation, d’embouteillage et de stockage des vins, le pôle de Blanquefort emploie 230 salariés sur 11 hectares de terrain. Dont 8 000 mètres carrés pour accueillir le plus important chai à barriques neuves d’Europe (avec 32 à 35 000 barriques, essentiellement de bois de chêne américain), mais aussi une zone de stockage avec 165 000 hectolitres de cuves, 11 000 palettes…
Malgré le gigantisme de ces chiffres, le groupe se sent actuellement à l’étroit et va développer une nouvelle plate-forme logistique (cliquer ici pour en savoir plus).