e lieu de rendez-vous ne pouvait pas mieux tomber. Pour leur 15ème matinée, les Œnologues de Bordeaux ont dressé l’état de l’art de la minéralité au Rocher de Palmer, à Cenon.
Les dernières études tendent à montrer que les notes de silex ou de pierre-à-fusil de certains vins seraient davantage liées la chimie des sulfites qu’à la présence de magnésium, de zinc ou de calcium dans les sols et les moûts.
S’ils n’ont pas d’influence sur le goût du vin, plusieurs experts ont expliqué que les minéraux du sol n’ont pas davantage de conséquences sur le déroulé des fermentations.
Alain Kleiber, référent technique chez Aurea AgroSciences est le plus nuancé. Pour lui, seul l’azote conditionne les vinifications. Les autres éléments ne font que renforcer son efficacité. « En particulier le magnésium, le soufre et le fer ». Le bore, le molybdène et le zinc constituent également des composés fonctionnels de l’azote. Leur disponibilité est souvent liée au stress hydrique du vignoble.
Responsable R&D pour BioLaffort, Joana Coulon regrette la pauvreté de la littérature sur le sujet. « On sait que l’azote est indispensable au bon déroulé des fermentations mais quid du magnésium, du calcium, du fer ? ». En collaboration avec l’ISVV, elle a étudié l’impact de différents composés organiques (acides aminés, vitamines, lipides), et de plusieurs minéraux sur des moûts carencés de sauvignon. Elle a reconstitué des autolysats de levure, en omettant à chaque fois un ou plusieurs composés. « Le magnésium n’a impacté ni le développement des levures ni les vitesses de fermentation », explique Joana Coulon. En revanche, les levures se sont mieux multipliées lorsqu’elles avaient du calcium à leur disposition. A l’inverse, le fer a ralenti les fermentations. « Il pourrait poser problème mais les autolysats de levure n’en contiennent pas. Au final, les minéraux semblent jouer un rôle très mineur », conclut la chercheuse. Elle doit désormais étudier leur impact sur la production d’arômes ou de composés soufrés.
A l’Université de Bourgogne, Maria Nikolantonaki est en train de creuser le sujet, du moins pour ce qui concerne les métaux lourds. Pour elle, le cuivre et le fer catalysent les oxydations, facilitent la production de composés soufrés et détruisent certains composés aromatiques, tels que les thiols. Ils gênent aussi les levures et bactéries. « Au-delà de 40 mg/l dans les rouges et dès 20 mg/l dans les blancs, le cuivre ralentit les fermentations alcooliques. Or, les moûts en renferment parfois jusqu’à 100 mg/l. Le cuivre contrarie aussi la multiplication des bactéries lactiques à partir de 4 mg/l », a-t-elle expliqué.
C’est bien loin du monde viticole. En faisant le tour du monde des toilettes pour analyser et lutter contre les mauvaises odeurs, que Christian Starkenmann, docteur en chimie organique chez Firmenich (numéro un mondial en création de parfums) a découvert le disulfane d’hydrogène. Cette molécule a l’odeur de pierre à fusil et de craquage d’allumette. Elle sent dix fois plus fort que l’H2S, à l’odeur d’œuf pourri. Le scientifique l’a aussi identifiée en entrechoquant deux silex. Puis, avec l’aide de l’école de Changins, il a analysé des chasselas jugés très minéraux et des vins non minéraux. Il n’a retrouvé le disulfane d’hydrogène que dans les premiers. Reste à comprendre son origine.