Catalogue français
Le CTPS réoriente 10 cépages résistants vers un classement temporaire

Soutenues par les Pays d’Oc IGP, les variétés italiennes ont été retoquées à cause d'incertitudes sur leurs capacités d'adaptation au vignoble français et sur le niveau de leurs résistances. Ainsi que sur les noms de huit de ces variétés.
S’il y a une chose que l’on ne peut pas reprocher à la section viticole du Comité Technique Permanent de la Sélection des Plantes Cultivées (CTPS), c’est sa constance, tenant d’une rigueur toute scientifique. Réunis ce 15 décembre à Paris, ses membres ont de nouveau donné un avis défavorable à la demande de classement au catalogue nationale de dix cépages italiens résistants au mildiou et à l’oïdium, appuyés par l’interprofession des vins IGP Pays d’Oc.
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Il s’agit des variétés cabernet Eidos, cabernet Volos, Fleurtai, merlot Kanthus, merlot Khorus, Julius, sauvignon Kretos, sauvignon Nepis, sauvignon Rytos et Soreli. Mais les experts ont également préconisé leur réorientation vers un classement temporaire, selon la nouvelle disposition mise en place cette année.
Pour motiver leur décision collégiale, les experts du CTPS se sont notamment basés sur trois faiblesses des dossiers présentés. Agronomiquement, les observations viticoles sont issues de plantations dans des conditions pédo-climatiques italiennes où la forte pluviométrie et la faible pression oïdium interrogent les experts. Les dix variétés étant issus des obtentions avec l’université d’Udine de la pépinière coopérative italienne Vivai Cooperativi Rauscedo (VCR, dans le Frioul).
La force des résistances aux maladies cryptogamiques est également mise en doute par le CTPS. Pour le mildiou, ces dix obtentions se basent notamment sur celle de la variété Bianca (qui a été contournée), tandis que pour l’oïdium, elle repose sur le gène Run3 (qui est considéré comme plus tolérant que résistant). Cerise sur le gâteau, les dénominations de neuf de ces dix cépages sont jugés non-conformes avec la légistation nationale rappellent les experts. Qui craignent des détournements de notoriété et des risques de confusion avec les cabernets, merlots et autres sauvignons.
Cet appel à la prudence, et aux essais locaux avant toute généralisation nationale, s’inscrit dans la lignée de la décision du dernier CTPS, du 29 septembre. Où pour quatre cépages résistants européens admis au catalogue, il y a eu sept avis de réorientation vers un classement temporaire pour des variétés étrangères, quand les quatre cépage du programme ResDur de l’INRA ont été adoubés pour un classement temporaire (de quinze ans).
Cette expertise ne devrait pas être du goût des représentants languedociens du vignoble, qui ont déjà montré leur impatience par le passé en interpelant le ministère de l’Agriculture. Et ont mobilisé le Conseil Spécialisé Vin de FranceAgriMer d’octobre dernier, qui a accepté en bloc les cépages résistants proposés. Avec une réserve cependant pour dix cépages (dont huit italiens, plus le cabernet blanc et le cabernet Cortis). Les élus du vignoble demandent en effet une clarification de leurs dénominations, comme le demande le CTPS. « C'est une demande purement franco-française » soupire Loïc Breton (VCR France, voir encadré).
Le travail de synthèse entre ces positions d’experts et de producteurs revient désormais au ministère de l’Agriculture. Un expert de la procédure estime qu’un groupe de travail pourrait être créé dès janvier, avec l’objectif de publier un décret avant mars. Afin de permettre les premières plantations sur la prochaine campagne.
Apprenant la nouvelle, Loïc Breton, le directeur générale de la branche française de VCR est loin d’être étonné par la décision du CTPS. « Que le classement soit temporaire ou pas, nous sommes là pour travailler et il y a une demande forte de la viticulture pour avancer dans les défis environnementaux actuels. Nous répondrons aux besoins français, l’an prochain il y aura une centaine d’hectares de résistants plantés en Italie » annonce-t-il. Ajoutant, philosophe, que « pour qu’un cépage soit planté, il faut qu’il marche bien culturalement et donne un bon vin. Ce n’est qu’à ces conditions qu’il trouvera sa place sur les marchés. »