n déplacement dans l’Aude à Saint-Laurent de la Cabrerisse pour rencontrer les viticulteurs et exploitants agricoles des Corbières touchés par l’incendie du 5 août dernier, la ministre de l’agriculture Annie Genevard a su répondre aux attentes d’urgence de ces derniers. Alors que les coupes budgétaires gouvernementales ont justement amputé la ressource du fonds d’urgence à sa disposition, la ministre a annoncé un fonds de 8 millions € pour parer aux pertes au regard des dernières estimations de surface, environ 1 500 ha, établies par la Chambre d’agriculture audoise. Ce chiffre estimatif reste néanmoins à prendre avec des pincettes, nécessitant d’être affiné et confirmé par la finalisation d’analyses des impacts de goûts de fumée.
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Les attentes des représentants professionnels étaient claires, et c’est donc près de 5 000€/ha qui sont débloqués au titre de la solidarité nationale pour compenser les pertes de récolte qui ne sont pas couvertes par l’assurance. Les diverses pertes de fonds, de matériel et de bâtiment sont couvertes par le système assurantiel existant, mais les exceptions pourront également rentrer dans le cadre éligible de ce fonds d’urgence. « Je suis venue réaffirmer la solidarité nationale. Nous sommes dans le temps de l’urgence, je vous apporte donc des réponses en ce sens », a déclaré Annie Genevard face à l’ensemble des représentants de filière viticole du département.
Les modalités d’application et d’éligibilité seront établies par les services de l’Etat sous l’égide du préfet une fois que le décret d’application définissant ces critères aura été publié. Les exonérations de cotisations diverses seront également pilotées par le préfet de l’Aude. En parallèle, Annie Genevard a confirmé le feu vert du Premier Ministre François Bayrou pour « une avance jusqu’à 10 000 € qui puisse être délivrée dans les 15 jours qui viennent aux producteurs en difficulté aigue, pour pouvoir ainsi faire face aux obligations urgentes de financement ». Selon les différents responsables professionnels présents auprès de la ministre, les verrous réglementaires et administratifs limitant l’achat de vendange ou de moûts par les vignerons sinistrés devraient être levés. Un seuil de 80% de la moyenne quinquennale de récolte est évoqué pour permettre aux vignerons de fournir leurs marchés.


« Je suis là aujourd’hui pour vous aider à surmonter, je reviendrai d’ici la fin d’année pour vous aider à consolider », a encore appuyé la ministre. Deux temps d’actions sont en effet distingués par la filière. L’urgence donc, et la reconstruction d’un avenir agricole et viticole des Corbières, et des zones méditerranéennes en général, face à l’évolution climatique. Restant relativement floue sur le sujet, mais promettant de revenir avec des annonces concrètes, et des orientations de financement d’ici fin 2025, Annie Genevard renvoie donc les attentes cardinales de l’arrivée de l’eau et de la pérennisation viticole et agricole à plus tard. La viticulture locale était déjà sur la corde raide avant cet épisode, et les responsables professionnels répètent à l’envi le coup de grâce que pourrait porter à moyen terme les conséquences de l’évolution climatique sans accompagnement dédié. « Depuis 10 ans, nous avons perdu 18% des exploitations du département, gagné 0,5°C et perdu 2 500 ha de vignes sur les seules Corbières. La misère peut s’installer très rapidement », a rappelé le président de la Chambre d’agriculture de l’Aude Ludovic Roux face à la ministre.
Accueillant la visite de la ministre, la cave coopérative du Cellier des Demoiselles, à Saint-Laurent de la Cabrerisse, établit ses pertes à un secteur de 300 ha de son vignoble survolé par les flammes et le nuage de fumée, pour un parcellaire d’apports de 400 ha en tout. « 80% de ces 300 ha sont touchés à divers degrés : brûlure, échaudage, goûts de fumée… Sur les 10 000 hl que nous produisons en moyenne, nous n’avons de garantie que sur 3 000hl préservés des effets du feu. Nous espérons pouvoir acheter suffisamment de raisins localement pour a minima servir nos marchés récurrents », décrit le directeur de la cave Anaël Payrou. « Pour la partie touchée par la fumée que nous pourrons vinifier, il faudra compter 5 à 10€/hl de fais de vinification supplémentaires pour traiter ces goûts, sans garantie du niveau qualitatif final », reprend le directeur du Cellier des Demoiselles.