’est une nouvelle prometteuse pour la valorisation des vins : ce 15 juillet, la Commission Européenne valide la demande d’accord de durabilité déposée le 25 mars dernier par les vins Pays d’Oc IGP (Indication Géographique Protégée), soit la première application de l’article 210a du règlement n° 1308/2013* de l’Organisation Commune des Marchés agricoles (OCM) qui permet ici la fixation de prix d’orientation pour le vin en vrac sous certification Agriculture Biologique (AB) ou Haute Valeur Environnementale (HVE) sur deux années (2025 et 2026). Alors que « le secteur viticole français est actuellement confronté à une importante surproduction, à l’évolution des préférences des consommateurs et à une sensibilité accrue des prix liée à l’inflation », ce nouvel outil désormais validé doit « inciter les viticulteurs à maintenir une production durable » écologiquement, mais plus coûteuse économiquement, avec des « prix d’orientation seraient fixés à un niveau couvrant les coûts de production selon l’une ou l’autre des deux normes de durabilité concernées (bio ou HVE), auxquels s’ajouterait une marge bénéficiaire allant jusqu’à 20 % de ces coûts » pose le communiqué de la Commission, qui se félicite d’un « premier avis relatif à la compatibilité d’un accord de durabilité avec les règles de concurrence de l’Union Européenne applicables au secteur agricole ».
Soutenue par le travail des Vignerons Coopérateurs, cette première va s’appliquer dès le millésime 2025 pointe Jacques Gravegeal, le président du syndicat des producteurs des vins Pays d’Oc, pour qui le gros du travail commence maintenant : « c’est une avancée politiquement importante, à nous de la saisir et de la faire vivre. On va s’y atteler fortement ! Les vendanges approchent, il va falloir cocher toutes les cases entre l’amont et l’aval, avec des discussions paritaires comme nous portons le dossier ensemble avec l’interprofession », InterOc. Approuvé par Bruxelles juste avant la fin du délai réglementaire de 4 mois, l’outil d’orientation des prix en bio et HVE s’applique pour Pays d’Oc sur six cépages (2 rouges : merlot et cabernet sauvignon, 2 rosés : grenache et cinsault, 2 blancs : chardonnay et sauvignon blanc). Soit 12 prix d’orientation à calculer selon les coûts de production majorés jusqu’à 20 % pour prendre en compte la valeur ajoutée.


Si les prix d’orientation seront informatifs et pas coercitifs, « il restera aux deux parties, acheteurs et vendeurs, de fixer le prix de commercialisation » note Jacques Gravegeal, pointant que Pays d’Oc rassemblant 62 % des IGP de France, cette orientation de prix pourrait compter pour d’autres bassins viticoles dans la période difficile qui frappe les vignobles. « Par définition, les accords de durabilité doivent permettre aux générations futures de continuer le métier en remontant le revenu qui freine les installations » note le vigneron du Pic Saint-Loup (Hérault), pour qui « la chance, il faut la créer : si nos enfants restent, c’est parce que l’on a créé des choses pour l’avenir ». En tout, Pays d'Oc produit annuellement l'équivalent de 83 millions de cols de vins bio. 5 000 opérateurs sont certifiés HVE.
Il n’y a plus qu’à
Avancée importante, cette autorisation d’orientation des prix n’est qu’une étape pointe Joël Boueilh, le président des Vignerons coopérateurs de France. « On a ouvert une porte, aux opérateurs (viticulteurs et négociants) de Pays d’Oc de se mettre autour de la table pour mettre en œuvre l’accord de durabilité » estime le viticulteur de Saint-Mont (Gers), pour qui « le cadre posé est clair et opérationnel pour les vendanges 2025 d’ici quelques semaines. Ce qui sera fait sera révélateur de ce qu’il est possible de faire. Les Côtes-du-Rhône y travaillent aussi, Bordeaux s’interroge. Dans le contexte que nous traversons, où l’on ne parle que de crises, c’est rassurant de voir un tel dossier avancer. » Cette décision « confirme la possibilité de mettre en place un accord de durabilité » confirme Anne Haller, la directrice des Vignerons Coopérateurs, qui souligne une « bonne nouvelle » et espère « un signal pour d’autres accords de durabilité et d’autres initiatives sur cette base. »
Un souhait partagé par la Commission européenne. « Nous espérons que cet exemple inspirera d’autres filières et régions à s’engager dans des démarches similaires en faveur d’une agriculture plus durable » déclare dans un communiqué Teresa Ribera, la vice-présidente exécutive de la Commission Européenne pour la Transition écologique. « J’encourage les producteurs d’autres secteurs et régions à explorer des solutions collaboratives similaires, qui profitent à la fois aux agriculteurs et à l’avenir de la production alimentaire en Europe » renchérit Christophe Hansen, le commissaire européen à l’Agriculture, pointant qu’« en autorisant de tels accords collectifs de durabilité, nous donnons aux viticulteurs occitans la sécurité juridique nécessaire pour coopérer et continuer à investir dans des pratiques plus durables ».
* : Si le nouvel article 210a de l’OCM a été adopté lors de la dernière réforme de la Politique Agricole Commune (PAC 2023-2027), ce sont les lignes directrices adoptées le 7 décembre 2023 qui ont permis de « clarifier la manière dont les acteurs du secteur agroalimentaire peuvent concevoir des initiatives conjointes de durabilité conformes à l’article 210a » détaille la Commission.