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-18 000 ha de vignes à Bordeaux qui n'en a pas fini avec l'arrachage primé
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-18 000 ha de vignes à Bordeaux qui n'en a pas fini avec l'arrachage primé

Constatant toujours un déséquilibre entre son offre et sa demande malgré la réduction de 15 % de son vignoble, Bordeaux se pose la question d’un nouveau plan d’arrachage, qui serait le troisième depuis 2023. Sachant que l’interprofession bordelaise "n’a plus les moyens" de mettre la main à la poche.
Par Alexandre Abellan Le 29 avril 2025
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-18 000 ha de vignes à Bordeaux qui n'en a pas fini avec l'arrachage primé
« Il est évident que l’on ne peut pas produire plus que ce que l’on est capable de vendre. Ce n’est pas tenable » pointe Allan Sichel ce 28 avril. - crédit photo : Alexandre Abellan
C

’est ce qui s’appelle crever l’excès. Ouvrant ce lundi 28 avril par un message vidéo l’assemblée générale du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), le préfet de Gironde, Étienne Guyot, chiffre la réduction du potentiel viticole bordelais : -15 % de ses surfaces avec 18 000 hectares de vignes arrachées entre 2023 et 2025. Après deux plans d’aide à l’arrachage en cours d’exécution (celui sanitaire régional à 6 000 €/ha et celui définitif national à 4 000 €/ha) et des arrachages volontaires (permettant de conserver les autorisations de plantation), le compte n’y est toujours pas indique le préfet.

Se basant sur la réunion de la cellule de crise départementale du 16 avril dernier, Étienne Guyot rapporte que « les participants ont estimé que l’offre et la demande n’étaient pas encore équilibrées. De ce fait, j’ai demandé que l’on puisse objectiver les surfaces supplémentaires qu’il serait nécessaire d’arracher de façon à faire remonter l’information au gouvernement. » Président de la Chambre d’Agriculture de Gironde, Jean-Samuel Eynard annonce que ses services s’engagent à mener un sondage de recensement « des surfaces qui seraient à nouveau demandées par des viticulteurs pour les arracher. Il est vrai que la situation se dégrade tous les jours. Demain, un viticulteur se lèvera en se disant qu’il n’a pas d’autre solution que d’arracher. Et il n’y a pas de solution pour lui aujourd’hui. »

-18 % en 3 ans

Annonçant dans son discours d’AG une « surface de revendication 2025 inférieure à 90 000 hectares, représentant une baisse de 18 % en 3 ans », Allan Sichel, le président du CIVB, se projette sur la suite et met « en parallèle de cette réduction de notre potentiel de production et dans un contexte de forte tension économique* » la mobilisation interprofessionnelle « pour assurer une juste rémunération de chaque acteur de la filière, dans le cadre de la loi Egalim » (via des propositions de loi plutôt qu’une révision globale, faute de visibilité sur le calendrier parlementaire).

Mais c’est bien la question de l’arrachage qui taraude Thomas Fonteyraud, représentant de la Confédération Paysanne de Gironde, interpellant le président du CIVB en fin d’AG pour « connaître la position du CIVB et de tous ses acteurs pour tirer tous dans le même sens et reconnaître que les arrachages primés sont clôturés maintenant et qu’il va falloir un arrachage renouvelé ».

Bordeaux n’a plus les moyens d’un plan d’arrachage complémentaire

« Le préfet a été très sensible à la demande de nouveau plan d’arrachage exprimé » confirme Allan Sichel, pour qui « il s’agit de recenser » afin « de quantifier le nombre d’hectares qui seraient susceptibles d’être arrachés ». Indiquant que l’interprofession bordelaise ne s’est pas positionnée sur un troisième plan d’arrachage « annuel renouvelable », son président affirme que « l’approche et la détermination de revenir à l’équilibre entre l’offre et la demande » mais prévient que financièrement « la filière Bordeaux n’a plus les moyens de remettre en place un plan d’arrachage complémentaire. Il faudrait voir comment on serait capable de le financer. »

Adoptés ce 28 avril, les comptes 2024 accusent le coup de l’investissement dans l’arrachage sanitaire (19 millions €) auquel s’ajoute la baisse des cotisations (20,2 millions € en 2024, -8 % en un an, alors qu’elles frôlaient 30 millions € en 2017) et l’augmentation des créances douteuses (face à la dégradation des recouvrements, faisant passer de 9 à 6 mois le ratio de trésorerie en mois de charges brutes).

Appel à des assises

Rappelant son étude de rentabilité des exploitations viticoles girondines de 2022, concluant que 40 000 ha vendaient à perte depuis 2010, Olivier Metzinger, membre du collectif Viti 33, appelle le CIVB à organiser des « assises de la viticulture » pour mobiliser un maximum d’opérateurs : « plus il y aura de cerveaux, plus il y aura d’idées. On a besoin d’un vrai travail de fond pour sauver cette filière et améliorer la rentabilité de nos exploitations. Pour l’instant, on ne travaille pas là-dessus. Il faut que l’on s’y mette, on n’avance pas assez vite. »

« Je n’ai pas l’impression que l’on reste les bras ballants » réplique Allan Sichel, estimant avoir mené son lot de réunions collégiales alors qu’il faut avancer : « la rentabilité des exploitations est une question mécanique d’offre et de demande. Il n’y a pas d’autres solutions : il faut baisser l’offre, promouvoir et créer la demande » estime le négociant, citant des actions du CIVB à l’export ("Bordeaux expérience" à Tokyo et San Francisco) ou en France (campagne "Bordeaux Crew" sur Wine Paris, opération "Bordeaux se met au verre" dans les restaurants et bars à vin de la capitale girondine…).

Formules incantatoires

Dans son discours Allan Sichel détaille que « chacune des avancées de nos entreprises, chacune des opérations que nous orchestrons sur le terrain, chacune des rencontres menées avec des professionnels ou des consommateurs, doivent être vues comme autant de graines semées, dans l'attente d'une reprise de l'économie ». Entre optimisme et réalisme, le président du CIVB tente la méthode Coué : « reprenons confiance : nos vins plaisent. Dans l'attente d'une reprise économique dont il est aujourd'hui difficile de savoir quand elle s'annoncera, répétons-nous cela comme un mantra. » Autre formule incantatoire de la part du préfet Étienne Guyot : « l’État est à vos côtés et ne faiblira pas ». Reste à trouver les voies et moyens selon le diagnostic d’une crise structurelle semblant toujours plus affectée par les éléments conjoncturels.

 

* : Chien fou dans un jeu de quilles avec ses annonces successives de taxes douanières, le président américain Donald Trump secoue non seulement le premier marché export des vins de Bordeaux (30 millions de bouteilles et 417 millions € de chiffre d'affaires en 2024), mais aussi l’économie mondiale (et donc la consommation internationale de vins, y compris bordelais). « Même si les 10 % de droit de douane imposés pendant 90 jours par le gouvernement américain entraînent un regain d'activité temporaire, personne ne peut estimer, pour l'heure, leur impact sur les vins européens, ni estimer l'impact d'une potentielle dépréciation du dollar sur les marchés » pointe Allan Sichel, notant que « dans l'expectative, nous ne pouvons que constater l'effet immédiat de cette guerre commerciale sur les bourses mondiales, et ses conséquences inévitables, à terme, sur la croissance, et donc la consommation ».

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Tous les commentaires (7)
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Albert Le 04 mai 2025 à 08:48:34
Jamais je n'ai lu que, au moins pour partie, le peuple vigneron bordelais (celui de l'AO de la base) s'interrogeait sur la cohérence, l'homogénéité des profils de son offre. Et quelle exigence insuffle l'ODG dans le contrôle interne ? .. Perso, j'ai arrêté d'acheter mon "petit" Bordeaux car je me suis lassé d'hypothéquer ma garantie "plaisir" espérée. Mon palais a probablement évolué avec le temps mais je confesse ne plus adhérer à ces profils durs, propres à l'extraction appuyée et souvent pesante .. faux nez d'une "vraie" matière ! .. revenez SVP au fruit, à la buvabilité de bon aloi et je reprendrai le chemin qui mène à vos jus.
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Dominique Le 02 mai 2025 à 09:17:39
On commence à se rendre compte que rien n'a avancé. Et surtout, que l'effondrement de l'économie girondine n'attend pas les tergiversations. Rien n'a bougé parce qu'on a gardé la gouvernance du CIVB qui ne fera rien d'autre que répéter ce qu'il a toujours fait. Répéter des mantras : " jusqu'ici tout va bien". En plus, on a un préfet qui en est encore à demander "d'objectiver" une situation qui n'échappe qu'à lui. Apprécier la situation en Gironde quand on a déjà la tête à Monaco, c'est effectivement difficile. La question est de savoir s'il y a encore assez d'énergie dans le vignoble pour renverser la table. Pour sortir des rails qui nous ont amené au désastre actuel, il faudra renverser les baronnies régnantes, ou alors accepter notre sort.
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Olivier Metzinger Le 01 mai 2025 à 08:23:24
Bordeaux ne veut toujours pas prendre le taureau par les cornes. NON la rentabilité des entreprises, ou de la vente du vin n'est pas le simple rapport entre offre/demande et mois de stock. La situation des blancs sec nous le prouve, ici à Bordeaux, et depuis quelques années (encore une fois, les chiffres du CIVB, lui même). Leur rémunération reste en dessous des coûts de production malgré des indicateurs "CIVB" et globaux favorables, (stock faible, demande mondiale, etc...). Les CROYANCES Bordelaises ont elles la peau si dure, qu'il faille attendre la disparition du vignoble pour enfin se poser les bonnes questions. La volonté de Prémiumisation et son plan d'action d'il y a 15 ans est un cuisant échec. Pourtant il n'y a aucun méa culpa. Avant 2017, nous avions déjà remarqué les prémisses d'une catastrophe avec le tassement du mirage Chinois, le gel et l'inflation des prix en découlant nous a encore confirmé que le marché n'était pas prêt pour des tarifs à la hausse, mais NON, la CROYANCE reste, implacable, inamovible. (Je vais, bien, tout va bien, ça ira mieux demain...) Plutôt que de se dire ensemble comment faisons nous pour vivre (pas survivre) dans le Monde tel qu'il est. La stratégie viticole Bordelaise (et peut être Française) est d'attendre des jours meilleurs. À priori, remettre en cause ses CROYANCES, est plus compliqué à accepter que sa propre disparition. Avec mes collègues, nous ne nous résignerons pas, nous n'abdiquerons pas non plus.
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Renaud Le 30 avril 2025 à 09:48:17
Si 2025 est une récolte normale et au vue de l'effondrement des sorties qui continue. Nos efforts d'arrachage n'auront servi à rien si non réduit pas considérablement les stocks puisque deux mauvaises récoltes n'ont pas suffit. À perdre du temps dans la protection du marché ( egalim et OP) et à minauder sur les mesures tout les efforts et argents mis n'auront servis à rien. L'efficacité de la distillation d'il y a 3 ans fut réduit à néant par les récoltes à 100000 ha qui ont suivi. Réduisons encore de 15 à 20000 ha. Distillons une campagne qui ne pourra pas se cette fois ci se reconstituer. En plus de protection des contrats amonts voilà un triptyque enfin efficacement rapide. Ça tombe bien on a plus le temps. Rappelle vous un incendie s'éteint au début avec un verre d'eau car à attendre on court derrière. C'est trop tard pour le verre d'eau. Mais si on pouvait encore éviter l'effondrement total du territoire. Attendre coûte collectivement plus cher chaque jour.
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bill et boule Le 29 avril 2025 à 13:23:26
Autre point de friction: le budget d achats média de la campagne de pub civb actuelle 2024 2025 .Au dela du budget de réalisation des visuels à la créativité très relative ,c est apparemment un autre budget de 12 millions d euros qui est consacré à l achat d espaces ... Quelle fut la stratégie de media planning, quel système de mesure aete mis en place et quels en sont les premiers résultats ???.La encore flou total , comme si de mauvais en tout , nous glisserions collectivement à un collectif de bons à rien. La base à besoin d'être rassurée et ce silence sur des infos aussi basiques n est pas réconfortant pour les campagnes .
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Renaud Le 29 avril 2025 à 13:13:14
Si ce n'était que l'équilibre offre demande qui fait le prix. Soyons cohérents et arrachons ce qu'il y a en trop. Donc encore autant à faire. Un peu de courage
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augustin Le 29 avril 2025 à 05:51:07
Le pari fait par l interprofession bordelaise de miser sur la seule réduction de l offre en entrée de gamme semble quelque peu risqué , du moins si l objectif est bien de sauver la filière. On reste surpris par l obstination des pouvoirs publics de continuer à vouloir éviter d entendre l avis des professions juridiques qui pourtznt se battent au quotidien aux côtés des petits chateaux: avocats notaires juges commissaires administrateurs judiciaires et mandataires liquidateurs. Ils ont tant à dire. Et on serait probablement avisé d interroger les représentants locaux de la fbf pour mesurer en temps réel l évolution des engagements bancaires en appui de la filière : decouvers de trésorerie, warrants sur stocks, lignes d escompté et prêts genevard 1 et 2. Enfin un appel à la solidarité entre grands crus classes et le reste de la profession , à la veille de la sortie du 2024 en primeur semblerait pertinente . Mais comme dans la pièce de Moliere , il semblerait que le seul consensus autour du malade et parmi ses médecins est la saignée, encore la saignée et toujours la saignée. Les chiffres de defaillance d entreprises pour la filiere ne sont purtznt pas bons et il est raisonnable de commencer à douter que l arrachage soit véritablement la panacée.Non seulement les cours s effondrent mais les parts de marché en linéaire se réduisent au profit de nos voisins italiens et espagnols, sans oublier nos concurrents des antipodes qui font merveille sur les marches en devenir . Arracher c est bien mais pourquoi faire ensuite ?
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