Toulouse, la jeune chercheuse Neïla Ait Kaci vient de démontrer qu’apporter de faibles doses d’alcool à la vigne peut améliorer sa réponse au stress hydrique. Pour cela, elle a pulvérisé sur des pots de boutures de gamay âgées d’un peu plus d’un mois différentes doses physiologiques d'éthanol. « 0 à 250 mM, correspondant à des ratios éthanol/eau compris entre 0 et 1,46 %, précise-t-elle, dans un article paru sur Oeno One. Au total l'expérience a porté sur 12 traitements : 6 doses d’éthanol apportées sur 2 niveaux d'arrosage, un pot bien arrosé tous les jours dès le lendemain et un pot mis en situation de stress hydrique. Chaque traitement a été répliqué 8 fois, et nous avons également suivi 8 pots sans bouture, pour arriver à un total de 104 pots. » Neïla Ait Kaci a ensuite mesuré la transpiration des plantes à partir du poids des pots et leur surface foliaire.
Pendant trois semaines, la chercheuse a calculé quotidiennement la fraction d’eau disponible dans le sol pour la plante (FTSW). Partie de 1, la FTSW de tous les pots bien arrosés est restée supérieure à 0,7 pendant les 24 jours de mesures. Comme attendu, celle des pots mis en situation de stress hydrique a progressivement diminué pour passer de 1 à moins de 0,1 en 15 jours en moyenne. La FTSW a diminué moins vite, restant supérieure à 0,1 jusqu’au 24ème jour. Parmi d’autres trouvailles, détaillées dans l’article, Neïla Ait Kaci a également découvert que l’ajout d’éthanol limite la transpiration de la vigne et l’augmentation de sa surface foliaire, « particulièrement pour la dose de 250 mM, avec une surface foliaire moyenne deux fois inférieure à celle des témoins à 0 mM bien arrosés ou en situation de stress hydrique. »
Un mois après le début de l’expérience, les deux feuilles supérieures des vignes mises en situation de hydrique commençaient à flétrir, sauf celles ayant reçu 250 mM. Neïla Ait Kaci les a toutes réarrosées progressivement jusqu’à réatteindre une FTSW de 0,95 et a récolté les feuilles et les racines de toutes les modalités. Cette fois, la chercheuse n’a pas constaté d’impact de la dose d’éthanol sur le pourcentage de feuilles séchées, avec une moyenne de 10% pour les plants arrosés, « prouvant que l’éthanol n’est pas toxique à des doses physiologiques » et de 80% pour les autres, ou sur le poids des racines. Pour Neila Ait Kaci, « le choix de la date de récolte basé sur le flétrissement des feuilles supérieures était probablement trop tardif. »
La technique déjà testée avec succès sur blé et sur riz doit désormais être éprouvée en conditions réelles. « Il faut encore évaluer l’impact de l’éthanol sur plusieurs variables comme la photosynthèse ou la température foliaire, pour éviter les coups de soleil », suggère la chercheuse. Le rendement sera aussi à surveiller. « Dans une précédente étude, la pulvérisation d’éthanol avait engendré une augmentation de 10% du poids des baies, mais la vigne n’avait pas été soumise au stress hydrique », termine Neïla Ait Kaci.