ous affirmez l’ambition que la France ravisse à l’Italie la première destination œnotouristique européenne : avec quel cap et quels moyens ?
Nathalie Delattre : En fait, je pense que l'on y est presque. Quand on regarde les chiffres, un tiers des visiteurs étrangers que l'on reçoit déclarent que leur motivation première est de venir en France pour la gastronomie et le vin français. Sur 100 millions de visiteurs, cela fait 33 millions. Et pourtant, Atout France ne recense officiellement que 12 millions d’œnotouristes et de spiritouristes en 2023 (en hausse de 20 % par rapport au dernier chiffre de 2016).
On voit que cette activité est en croissance et que les vignerons jouent de plus en plus cette carte parce qu'ils ont bien compris qu’il faut diversifier l'activité. L’œnotourisme représente de gros investissements, mais ça a un impact direct sur la vente des vins. Aujourd'hui, on a plus de 10 000 caves qui sont ouvertes. Et le Conseil Supérieur de l'œnotourisme qui a été créé en 2009 par Michel Barnier et Hervé Novelli a mis en place le label Vignoble et Découverte qui est une belle réussite puisque l'on a 75 circuits et 8 700 opérateurs qui sont labellisés aujourd'hui
J'ai demandé au Conseil Supérieur de l'œnotourisme de nous rendre une nouvelle feuille de route ambitieuse pour aller plus loin. Nous sommes en plein dans les journées de l'intelligence artificielle, nous savons que par la gestion des flux, par un traitement d'appli et d'intelligence artificielle, il est possible de rendre plus accessibles et visibles les offres de nombreux vignerons et vigneronnes avec un investissement accessible.
Quels sont les outils pour professionnaliser l’œnotourisme ? Hervé Novelli évoquait à une époque l’idée de créer des étoiles pour les vignobles, comme il l’avait fait pour l'hôtellerie.
Il faut professionnaliser et assez rapidement, puisque la feuille de route du tourisme durable, inclusif, innovant, on l'écrit pour 2030. Il y a des marges de progression pour faire en sorte que beaucoup de propriété s'en emparent. Il s’agit de mettre en réseau pour que l’on puisse créer des itinéraires. Certains créent des choses extraordinaires sans vraiment regarder quel était l'écosystème autour. La mise en réseau va faire la différence pour créer un itinéraire et inciter les touristes à pouvoir aller d'un point à l'autre et de réaliser leur rêve, c'est à dire de goûter ces vin français et de déguster l'excellence de la cuisine française.
La diversification commerciale devenant une impérieuse nécessité face à la crise viticole, l’œnotourisme est une piste, mais pourra-t-il faire des miracles ?
C'est une carte supplémentaire, c'est un appui. Mais y arriver il faut s’appuyé sur un produit qui est note patrimoine. Il faut pouvoir le conserver en l’état et pouvoir investir pour faire en sorte qu'il soit mis en tourisme. C’est une diversification, mais ce n'est en rien un remplacement de l'activité.
Quand vous présidiez l’Association Nationale des Élus du Vin (ANEV), vous demandiez la tenue d’un Grenelle de la viticulture française : est-ce que vous le portez maintenant au niveau du gouvernement ?
Oui, tout à fait. Je pense qu’à un moment donné, il faut qu'on puisse parler de marque France et de complémentarité. Aujourd'hui, la concurrence est internationale. Nous avons des réponses à apporter, mais avec des outils différents. Il ne s'agit pas de mettre un outil en place à la place d'un autre, mais bien de continuer, comme je l'ai toujours dit, à compléter la palette de nos dispositifs pour que chaque propriété puisse s'emparer des outils qui lui conviennent pour sortir de la crise. Ou en tout cas avoir un palier de croissance supplémentaire. Il faut vraiment que cette filière fasse l'objet d'une attention à part entière.