l n’y a pas que la seule apparence physique que Jean-Philippe Granier partage avec Roberto Benigni. La faconde, la passion et l’enthousiasme offrent également à l’homme de belles similitudes avec le comédien italien. Grosse différence pourtant, c’est au service des vins de l’AOP Languedoc que cette cheville ouvrière du syndicat d’appellation a mis toute son énergie depuis 35 ans.
Un syndicat qu’il a intégré en 1990, la jeune AOC (1985) s’appelant encore coteaux du Languedoc, pour y animer la formation et l’apprentissage de la dégustation, avant de développer par la suite toute la dimension évènementielle et communicante de l’appellation, et un travail de longue haleine sur la hiérarchisation et les crus. Aujourd’hui ce docteur en pharmacie, œnologue et fils de vigneron part à présent à la retraite avec un témoignage éclairé sur l’histoire de son appellation. « J’ai formé plus de 1200 vignerons aux spécificités de nos vins, et dernièrement des petits-enfants de quelques-uns des premiers que j’ai formés à mon arrivée », aime-t-il à rappeler au moment de dérouler son parcours.
Embarqué à ses débuts dans une carrière de pharmacien, « pour faire plaisir à ma mère », glisse-t-il malicieusement, son amour pour le vin le pousse vite à bifurquer vers la sommellerie, le conseil œnologique puis le syndicat AOC Languedoc dès 1990. Aujourd’hui encore, il n’en démord pas et continue de citer son mentor Jean Clavel et « montrer que le vin est autre chose que juste de l’alcool, c’est un élément culturel, un vecteur de conversation », appuie-t-il.
C’est ainsi qu’il revendique également avec fierté la tenue du premier salon français du mouvement slow food en 2003 à Montpellier et surtout la création des Estivales de Montpellier en 2005. Ces rendez-vous des soirées de fins de semaines autour du vin « ont rencontré un succès considérable en drainant 20 000 personnes par soir, pour depuis essaimer, si bien qu’on trouve à présent des estivales dans les villages, les domaines… », se réjouit celui qui est ensuite devenu directeur technique de l'appellation et directeur de la maison des vins de Saporta.
Très fier aussi de la marche vers la hiérarchisation des crus qui a été opérée dans l’appellation, il regrette néanmoins la lenteur de ce processus dans le fonctionnement de l’Inao. « Cela demande à chaque fois une génération pour aboutir, ça épuise les gens ! », tranche-t-il en citant les 25 ans nécessaires à l’aboutissement du dossier Montpeyroux. Il regrette également quelques ratés de certains salons organisés, se demandant aujourd’hui si ce format des salons n’est pas devenu inadapté.
Mais alors que ses deux fils ont aussi tracé leur sillon dans le monde du vin et qu’il continue lui-même son activité viticole au sein du Mas Granier, associé à son frère, Jean-Philippe Granier s’insurge contre les difficultés actuelles du marché et « les prix des vins qui ne sont pas à la hauteur, tout doit être vendu à des prix rémunérateurs ». Voyant toujours le vin comme un lubrifiant social qui n’a de sens que s’il garde sa dimension humaine, Jean-Philippe Granier passe la main en toute confiance au sein d’un syndicat d’appellation où il adoube la directrice Stéphanie Daumas et la restructuration de la communication et l’évènementiel.