l’occasion du conseil sectoriel vitivinicole des coopératives agroalimentaires d’Espagne la semaine dernière, les représentants de la filière ont estimé la production de vins et de moûts sur le territoire espagnol à 37 036 500 hectolitres, soit près de 3 Mhl de moins qu’au tout début des vendanges. La sécheresse a mis à mal les premières prévisions, notamment sur la partie est du pays, que n’ont pu compenser que partiellement les volumes récoltés dans les régions de Castille-La Manche et d’Estrémadure.
Des pluies salvatricesDans le premier cas, le principal vignoble espagnol a profité d’un temps sec et chaud, minimisant la prolifération de maladies cryptogamiques et favorisant ainsi un bon état sanitaire général. Résultat : Castille-La Manche devrait récolter 23 Mhl de vins et de moûts cette année, soit 62 % de la production nationale. L’élaboration conséquente de moûts devrait servir à équilibrer le marché du vin. De son côté, l’Estrémadure s’attend à une récolte de 3 Mhl cette année, les pluies favorisant la reprise des vignes après la sécheresse des années précédentes. La Catalogne n’aura pas eu cette chance, même si toutes les zones ne sont pas logées à la même enseigne. Le Priorat, les terres arides de Terra Alta et certains secteurs de Tarragone ont été sévèrement touchés. Dans la région du Cava, si les pluies printanières ont sauvé les vignes situées dans le Camp de Tarragone et le Penedés – dont la survie était menacée – la production restera largement inférieure aux niveaux historiques. En effet, la prévision pour 2024 fait état d’un volume de 1,87 Mhl, contre une moyenne de 5,5 Mhl avant la sécheresse.
Plusieurs grandes régions en baisseLes intempéries se sont abattues à plusieurs reprises sur la région de Castille-et-Léon, réduisant ainsi son potentiel de production qui pourrait s’établir à 2 Mhl. Si Ribera del Duero, Bierzo et Cigales accusent une baisse cette année, Rueda, au contraire, a réalisé une récolte exceptionnelle, en qualité comme en quantité. Des pluies en septembre, tempêtes, changements brusques de température et même glissements de terrain dans la Rioja auront compliqué la tâche des producteurs cette année, conduisant à une petite récolte de 1,35 Mhl. Des baisses importantes sont également attendues en Navarre, Valence, Aragon et Murcie en raison des conditions climatiques difficiles.
Malgré une récolte 2024 qui s’inscrit dans la moyenne et un niveau de stocks faible, plusieurs organisations agricoles espagnoles ont demandé au gouvernement de subventionner l’arrachage des vignes pour adapter l’offre à une demande en baisse. Cette mesure ne fait pas l’unanimité en Espagne, le ministre de l’Agriculture Luis Planas et les bodegas y étant opposés. « Chaque pays a aujourd’hui ses propres problèmes et ses propres solutions », avait déclaré le ministre lors de son intervention à Dijon à la mi-octobre. A l’occasion du centenaire de Bodegas Ramón Bilbao dans la Rioja le 24 octobre, Luis Planas a réitéré son soutien au secteur, affirmant que sa situation était « assez équilibrée », qu’il avait la capacité à s’adapter et qu’il avait « un présent et un avenir ».
95 000 ha potentiellement abandonnésDe leur côté, les organisations agricoles que sont l’UPA, la COAG et l’Asaja estiment que la situation difficile dans laquelle se retrouvent certains petits producteurs et retraités justifient de subventionner les arrachages. La COAG a estimé à 95 000 hectares, la superficie de vignes qui pourrait être abandonnée si l’arrachage n’était pas subventionné. Les syndicats ont demandé une aide financière, que les vignes soient arrachées de manière temporaire ou définitive.