Aujourd’hui l’année exceptionnelle est l’année sans aléa climatique », continue de scander Jean-Marie Fabre. Depuis 3 ans, le président des vignerons indépendants de France attend du gouvernement un « plan Marshall » et la mise à disposition d’outils techniques, fiscaux et assurantiels pour y faire face. « Lors de notre dernière enquête nationale, 62 % de nos adhérents ont désigné l’aléa climatique comme première cause d’instabilité économique pour leur entreprise, devant l’inflation et les charges » insiste-t-il.
Souhaitant marquer les esprits pour faire bouger les choses, le vigneron de Fitou a reçu deux fois le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau sur son exploitation, « où il est tombé en 3 ans 469 mm, moins que lors d’une année moyenne ». Jean-Marie Fabre a prévenu que ce qu’il vivait en ce moment était « la démonstration de ce que connaîtrait bientôt l’ensemble de la France » et enfoncé le clou sur le dernier Salon de l’Agriculture en reprenant les propos de Jacques Chirac devant le premier ministre Gabriel Attal et le président Emmanuel Macron, « pour les inviter à ne pas regarder ailleurs alors qu’une partie de la France brûle, mais plutôt à être au rendez-vous du destin climatique du pays ».
Jean-Marie Fabre a vu son acharnement récompensé ce 16 juillet avec le lancement par le gouvernement d’une concertation relative à un plan baptisé « agriculture climat Méditerranée », dont l’objectif est, sur une zone "test", d’accompagner les agriculteurs pour éviter la désertification et les risques d’inondations, de coulées de boue, ou d’incendies qu’elle fera courir aux populations.
Etat, collectivités territoriales, Chambres d’Agriculture, organisations professionnelles et autres structures d’accompagnement des agriculteurs (coopératives, banques, assurances…) doivent se retrouver ces prochains jours autour d’une table pour échanger sur les conséquences du changement climatique sur les différentes filières, faire émerger des projets de territoires grâce à une première enveloppe de 50 millions d’euros, et réfléchir à la diversification.
Le président des vignerons indépendants attend beaucoup des discussions sur la ressource en eau. Il souhaite une accélération des projets de retenues collinaires pour l’irrigation, « notamment dans des zones d’expansion de crue, près de l’Orb ou de l’Aude, en profitant par exemple des trous creusés pour la construction de la LGV ou le doublement de l’autoroute A9 », davantage de réutilisation des eaux usées, et la construction de nouvelles infrastructures pour amener l’eau du Rhône jusqu’aux Pyrénées. « Actuellement, on pompe annuellement 150 millions de mètres cubes d’eau du Rhône sur les 55 milliards déversés dans la Méditerranée. Cette année, avec le printemps extrême qu’a connu la moitié nord de la France, c’est même sur 60 milliards. En utiliser 80 à 150 millions de plus via la construction d’un nouvel Aqua Domitia ne semble pas déraisonnable pour sécuriser l’agriculture quand les retenues collinaires et la Reut ne sont pas suffisantes » justifie-t-il.
Il espère surtout que ce plan constituera « le top départ » d’une prise de conscience plus générale et des projets dans les autres bassins viticoles français et européens. Jean-Marie Fabre prévient que « pour l’Etat le coût de ces projets est sans commune mesure avec celui auquel il devra faire face dans 10 ou 20 ans si les friches remplacent la vigne, que le maillage économique lié à la viticulture disparait, et que des incendies dévastant des centaines de milliers d’hectares font déplacer les populations ».