Laurent Wauquiez : Ce que je veux d’abord dire, c’est qu’il faut arrêter avec la folie qui consiste à dénigrer nos agriculteurs, nos viticulteurs et leurs produits. Il faut au contraire dire notre fierté et notre reconnaissance aux grands professionnels de notre territoire et défendre notre viticulture ! Les vignobles français racontent tous la diversité remarquable de notre patrimoine naturel ; de notre géographie ; de notre histoire et de nos savoir-faire ancestraux. Ils incarnent l’art de vivre à la française que nous devons préserver. Les exportations de vins et spiritueux constituent également une force majeure pour l’attractivité économique de notre pays en se plaçant au deuxième rang de la balance commerciale nationale derrière l’aéronautique.
Enfin, le vignoble français ce sont 10 millions de touristes qui viennent chaque année, chercher un tourisme de sens, au contact des vignerons et qui fait la part belle à nos terroirs.
Après un dispositif covid, la Région a lancé un plan d’aides 2023-2027 pour soutenir ses vignobles : investissements de production, promotion et gain de notoriété, activité des pépinières, transition numérique… Quel est son premier bilan ? Le dispositif va-t-il évoluer, être renforcé ?
Le plan filière 2023-2027 apporte un soutien financier aux exploitations pour leur permettre de relever les défis de demain et maintenir un bon niveau de compétitivité en poursuivant l’adaptation des productions aux enjeux environnementaux et en soutenant leur développement économique et la conquête de nouveaux marchés. Via notre soutien à l’œnotourisme et à la visibilité de nos appellations, nous voulons ancrer Auvergne-Rhône-Alpes en tant que grande région viticole.
Je peux vous dire que le premier bilan est positif, puisque les vignerons ont mobilisé les dispositifs avec un taux de réalisation de près de 80 %. Le plan filière vin permet une certaine agilité et pourra évoluer en fonction des besoins de la filière en Région, notamment sur le matériel innovant dans la robotique.
Alors que la déconsommation nationale pèse sur les ventes de vin rouge et le moral de sa filière, comment expliquez-vous que le Beaujolais semble épargné ? La montée en gamme n’est-elle pas un risque de décrochage des marchés de consommation en période d’inflation ?
La déconsommation française de vin a commencé il y a 30 ans, elle est passée de 100 litres/habitant/an en 1975 à 40 litres aujourd’hui. Tout ceci est générationnel, puisque les jeunes consomment moins et plébiscitent davantage des vins fruités et frais avec un degré d’alcool maitrisé. Malgré l’impact de l’inflation sur les ventes, la poursuite de la montée en gamme est nécessaire, car elle répond aux attentes des consommateurs qui prêtent davantage attention à la qualité des vins. La diversité de nos cépages et de nos terroirs en Région Auvergne-Rhône-Alpes, offre une large gamme de vins qui permet une présence de nos vins sur tous les segments !
Comment résoudre le défi de la pyramide des âges dans le vignoble, pour que des jeunes puissent s’installer et que les retraités puissent quitter dignement le métier ?
La viticulture comme l’agriculture connait une forte tension sur les recrutements. En Auvergne-Rhône-Alpes, les vignes sont souvent implantées en coteaux ou sur des fortes pentes qui ne sont pas mécanisables. Par ailleurs, la poursuite de la transition agroécologique et l’évolution des pratiques culturales génèrent de nouveaux besoins en recrutement. Nous devons agir sur l’attractivité des métiers et des formations viticoles. A ce titre, le Comité Vin et la Région Auvergne-Rhône-Alpes sont présents au Mondial des Métiers à Lyon en décembre 2023, pour présenter les opportunités de recrutement et de formations. Nous devons favoriser l’installation et la transmission entre générations et faire évoluer la fiscalité des transmissions. Le sujet du foncier est également crucial.
Face à la pression des aléas climatiques (sur les rendements et la résilience des exploitations) et aux demandes sociétales (pour réduire les phytos), comment voyez-vous l’avenir du vignoble ?
Le changement climatique est un enjeu fort pour la filière viticole et pour la pérennité de nos vignobles. La filière viticole, grâce au soutien de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, agit sur deux leviers : les moyens mis en œuvre pour atténuer le changement climatique (diminution des intrants, mécanisation du travail des sols, évolution des pratiques culturales et du matériel végétal) et les moyens de prévention pour préserver les productions des phénomènes climatiques (moyen matériel et/ou système assurantiel).
Lorsqu’une exploitation est touchée, humainement et économiquement l’impact est très fort. Il est important que le producteur sache que la Région peut l’aider. A titre d’exemple, la Région peut accompagner les vignerons qui souhaitent investir dans un matériel de protection contre le gel ou la grêle avec des taux d’aide qui peuvent atteindre 70 % du montant engagé.
Pour rappel, notre plan filière vin doté de 10 millions € sur 5 ans permet aux exploitations de bénéficier d’un réel soutien financier de la Région, couplé à des programmes d’expérimentation nécessaires pour anticiper l’avenir. Je veux rassurer les viticulteurs d’Auvergne-Rhône-Alpes et leurs dire qu’ils me trouveront toujours à leurs côtés pour les aider.