a guerre en Ukraine et la montée en flèche du prix de l’énergie auraient-elles bon dos pour les verriers italiens ? C’est en tout cas ce que soupçonne l’Autorité nationale de la Concurrence et du Marché, alertée par trois signalements dont un anonyme. En effet, la société Bottega S.p.A, importante productrice de Prosecco et d’autres boissons alcoolisées (67 M€ de chiffre d’affaires en 2022), ainsi que l’organisme à but non lucratif Fondazione Filiera Italia, ont estimé que les principaux verriers italiens (Berlin Packaging Italy, Bormioli Luigi, O-I Italy, Verallia Italia, Vetreria Cooperativa Piegarese, Vetreria Etrusca, Vetri Speciali, Vetropack Italia et Zignago Vetro) se seraient coordonnés pour définir les augmentations de prix des bouteilles en verre pour le vin.
Pour appuyer leurs arguments, les deux structures lanceuses d’alerte ont fourni des lettres et des courriels envoyés par les verriers à leurs clients entre mars et septembre 2022 communiquant des augmentations générales des prix de vente des bouteilles en invoquant l’augmentation exponentielle des coûts de l’énergie et des matières premières. Or, selon l’Autorité de la concurrence, « dans ces communications il y aurait des similitudes significatives, tant dans le montant des augmentations communiquées que dans leur formulation littérale. Les augmentations susmentionnées auraient été appliquées rétroactivement ou avec effet presque simultanément à la communication correspondante pour les commandes déjà passées ou à passer ». De plus, ces hausses « bien que présentées par les fabricants comme étant temporaires, se seraient poursuivies jusqu’en 2023, malgré la baisse des coûts auxquels elles seraient liées ». De son côté, Filiera Italia se plaint « d’une augmentation du coût des bouteilles supérieures à celles enregistrées par d’autres facteurs de production et tendances inflationnistes ».


Les données fournies par l’ISTAT (institut national des statistiques), « montrent que tout au long de l'année 2022 et également au premier semestre 2023, l'indice interne des prix à la production [de bouteilles] y afférent a subi une augmentation significative ». Pendant ce temps, toujours selon l’Autorité de la concurrence, la production n’a cessé d’augmenter – hormis en 2020 pour cause de Covid – ce qui écarterait une éventuelle pénurie. L’instance déduit qu’à partir « des informations disponibles, il est raisonnable de déduire l'existence, au moins depuis le début de 2022, d'une coordination des stratégies commerciales entre les sociétés Berlin Packaging, Bormioli, O-I, Verallia, Vetreria Piegarese, Vetreria Etrusca, Vetri Speciali, Vetropack et Zignago Rétro… Un tel comportement, s'il était confirmé, révélerait l'existence d'une altération de la dynamique concurrentielle entre les principales entreprises opérant sur le marché national de la production et de la vente de verre creux pour bouteilles de vin et pourrait résulter d'un accord horizontal, sous la forme d'un accord et/ou d’une pratique concertée, visant à éviter une comparaison concurrentielle correcte entre opérateurs ».
Enfin, l’Autorité s’interroge sur « l'hypothèse de l'existence d'un éventuel accord restreignant la concurrence entre les Parties visant à fixer le prix des bouteilles de vin en verre de manière coordonnée en violation de l'article 101 du TFUE ». En effet, si une entente était confirmée, elle « semble susceptible… d'affecter le commerce entre les États membres et est donc de constituer une violation de l’article 101 TFUE ». Les entreprises visées disposent d’un délai de 60 jours à compter de la notification de la disposition pour se justifier, sachant que la procédure doit être conclue au plus tard le 31 décembre 2024.