'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a trouvé un lien entre la survenue de leucémies lymphoblastiques chez les enfants de moins de 15 ans et la proximité de leur lieu d’habitation à des parcelles de vigne.
« Le risque de leucémie infantile n’augmente pas avec la simple présence de vignes à moins de 1000 m de l’adresse de résidence, mais il augmente légèrement en fonction de la surface totale des vignes présentes dans ce périmètre » assurent ses chercheurs.
Dans le cadre du programme Geocap*, les chercheurs de l’Inserm ont repris les données du registre national des cancers de l’enfant sur la période 2006-2013 et estimé la présence et la surface de viticulture autour de l’adresse de résidence des 3 711 enfants de moins de 15 ans atteints de leucémie en France métropolitaine sur cette période. « Cette estimation a également été réalisée pour 40 196 enfants non malades du même âge (témoins), sélectionnés pendant la même période à partir de bases de données fiscales pour être représentatifs de la population métropolitaine de moins de 15 ans » expliquent les scientifiques.
Les adresses des cas et des témoins ont été transmises sans autre indication à une société privée qui a déterminé les coordonnées (latitude, longitude) correspondantes en utilisant la base d’adresses de référence de l’IGN, des données cadastrales et des photos aériennes. La présence et la surface en vignes autour de ces coordonnées ont été évaluées en utilisant des cartes permettant de repérer les cultures agricoles construites.
Le croisement de ces donnés a mis en lumière deux résultats principaux. En premier lieu, la présence de vignes à moins de 1000 mètres de l’adresse de résidence n’est pas plus fréquente chez les cas (9,3%) que chez les témoins (10%). En d’autres termes, d’après ces résultats, la simple présence de vignes à moins de 1000 m de l’adresse de résidence ne semble pas en soi être un facteur de risque de leucémie.
En revanche, les chercheurs observent une association entre le risque de développer une leucémie de type « lymphoblastique » et l’étendue de la surface couverte par les vignes, dans ce périmètre de 1000 mètres autour de l’adresse des enfants. « Ce risque augmente de façon modérée en fonction de la surface couverte par les vignes : en moyenne pour chaque augmentation de 10 % de la part couverte par les vignes dans le périmètre de 1000 mètres, le risque de leucémie lymphoblastique augmente de près de 10% » détaillent-ils. Ces résultats restent identiques en prenant en compte d’autres facteurs susceptibles d’influencer le risque de leucémie, comme le degré d’urbanisation et le niveau moyen journalier d’UV dans la commune.
« Nous mettons en évidence une augmentation modérée du risque de leucémie, qui nous incite à poursuivre nos travaux. Nous avons ici commencé par la viticulture qui est une culture pérenne plus clairement identifiable que des cultures soumises à des rotations, par exemple, et qui fait l’objet de nombreux traitements phytosanitaires. Les analyses concernant les autres cultures sont en cours de même que les analyses d’autres types de cancers. En parallèle, nous travaillons sur l’évaluation des expositions aux différents pesticides utilisés sur ces cultures. C’est un travail long, complexe qui repose sur plusieurs collaborations », conclut Stéphanie Goujon, chercheuse Inserm et dernière autrice de l’étude.
A la lecture de l’étude, Générations Futures a demandé une extension forte des zones non traitées (ZNT) en bordure des cultures et un accès complet et en temps réel aux données d’utilisation des pesticides à la parcelle.
* Cette étude a été réalisée dans le cadre du programme Geocap, en collaboration avec Santé publique France et avec le soutien financier de l’Anses et de l’INCa. L’ensemble des résultats est décrit dans le journal Environmental Health Perspectives.