Mais qui conseillera les consultants ? demanderait un Juvénal moderne dans la filière vin. Car « le conseil évolue et pose la question de sa valeur ajoutée » reconnaît Julien Viaud, le président et co-actionnaire du laboratoire Rolland & Associés (basé à Pomerol), pour qui « en plus de l’assemblage et de l’expertise, les propriétés attendent de nouveaux services : réponses aux enjeux environnementaux avec la réduction des phytos et la production de raisins plus sains » énumère l’ingénieur agronome. Relevant « beaucoup de réflexions empiriques sur le terrain sur l’agroécologie, l’agroforesterie, le vitipastoralisme… » et autant de « belles cartes de vigueur à l’utilisation très limitée », le laboratoire bordelais propose cette année une analyse génétique des sols pour « conseiller, chiffrer, diagnostiquer et travailler ».
Concrètement, « on prélève quelques grammes de sol qui comportent des millions de champignons, des dizaines de millions de bactéries, et on fait appel à prestataire (sur lequel on ne communique pas), qui a identifié pendant 15 ans d’expérience les microorganismes d’intérêt pour la viticulture » explique Alexandre Béra, consultant en viticulture et œnologie pour le laboratoire Rolland & Associés. Avec la technique de séquençage Illumina MiSeq et cette base de données interne, l’analyse des microorganismes du sol permettrait d’estimer leur activité biologique sur le cycle du carbone, la biodisponiblité de l’azote, du phosphore, du potassium et des microélements (cuivre, zinc, soufre…)… Avec ces données, « on est capable de comprendre si les microorganismes jouent leur rôle pour la biodisponibilité. Cela permet de connaître comment se positionne l’échantillon par rapport aux moyennes quantitatives et qualitatives » ajoute Alexandre Béra, notant que « l’analyse chimique de sol tel qu’on connait aujourd’hui c’est voir si le frigo est plein. L’analyse génétique permet de savoir si la porte est facile ou non à ouvrir pour nourrir la plante. C’est le chaînon manquant être la plante et le sol. »


L’œnologue pointe une « prise de conscience dans les propriétés pour préserver l’activité microbiologique des sols. On s’intéressait jusque-là à la fertilité chimique des sols, ce n’était pas suffisant : il faut travailler la fertilité biologique, quantitative et qualitative. » Les premiers retours d’analyses démontrent que toutes les mesures agroécologiques ne sont pas forcément optimisées. Prenant le cas d’un même mélange d’engrais verts (graminées, légumineuses et crucifères) ensemencé sur toutes parcelles d’un domaine, Alexandre Béra pointe que « des crucifères rendent plus biodisponibles la potasse. Et sur un terroir où il y en a beaucoup, cela va favoriser sa biodisponibilité sur la magnésie et déséquilibrer la plante. Ce qu’une analyse peut déterminer. »
Ces analysés permettent « de connaître finement le fonctionnement du sol et d’avoir les bons intermédiaires » résume Julien Viaud, qui précise que le coût des analysés dépend des problématiques et du nombre d’échantillon. Un prix moyen s’alignerait autour de 700 à 1 000 €/ha.