u’est-ce qui ressemble plus à un combat fratricide qu’une guerre intestine ? Osons une comparaison entre le récent derby milanais, opposant les clubs de foot Milan AC et Inter Milan (le derby de la madonnina), et le départ acté de l’appellation Fitou du Conseil Interprofessionnel du Vin du Languedoc (CIVL). En ayant assez de voir son identité diluée et ses apports financiers noyés dans l’interprofession, l'appellation audoise pourrait tenir le rôle du Milan A(O)C, aux supporters historiquement issus des milieux populaires et au jeu offensif spectaculaire porté par des individualités ayant le champ pour s’exprimer (tel le numéro 10 Gianni Rivera, 1960-1979). Dans l'Inter(profession) Milan on pourrait voir le CIVL, outil collectif forcément massif, particulièrement affûté pour l’international, mais paquebot ayant du mal à satisfaire toutes les attentes. Rouleau compresseur physique, l’Inter Milan est porté par une tactique plus défensive et une image plus bourgeoise*, n’empêchant pas d’occuper le terrain adverse pour marquer (avec la stratégie de "catenaccio", verrou, mise en place par l'entraîneur Helenio Herrera, 1960-1968 et 1973-1974).
Dans les clubs de football comme dans la filière vin, la compétition est un état de fait, que certains peuvent regretter, mais qui pousse au dépassement de soi. Et de rappeler la nécessité de démontrer sa légitimité à évoluer parmi les grands de ce monde, ainsi que de se remettre en question pour ne pas laisser les lauriers au voisin. Un cercle vertueux, qui ne donne cependant des rencontres à grand spectacle que lorsque chacun reste fraternel, du terrain aux conférences de presse, en passant par les salons et les tribunes. Partageant le même nom de famille sur les maillots, que ce soit Milan ou Languedoc, les équipes ici comparées partagent la même ambition : séduire de nouveaux fans et rester la référence pour les anciens. C’est en se surpassant plus qu’en rabaissant l’adversaire qu’une équipe gagne à être connue et reconnue. Qu'est-ce qui ressemble plus à une réussite collective qu'une succession de performances individuelles ?
*: Image d’Épinal à relativiser, les experts du calcio rappelant que le Milan AC ayant eu des années plus fastes que laborieuses lorsque son propriétaire était Silvio Berlusconi.