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50 000 € d'amendes requis contre Bernard Magrez et sa cabane sans permis
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La Tour Carnet
50 000 € d'amendes requis contre Bernard Magrez et sa cabane sans permis

Pour la première fois, l'homme aux quatre grands crus classés se retrouve à la barre du tribunal judiciaire de Bordeaux, en tant que prévenu, jugé pour avoir construit sans permis "la cabane de l’émotion" au sein du château La Tour Carnet dans le Médoc.
Par Colette Goinère Le 04 mai 2023
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50 000 € d'amendes requis contre Bernard Magrez et sa cabane sans permis
Bernard Magrez et un de ses avocats, maître Pierre Blazy. - crédit photo : Colette Goinère
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e mercredi 3 mai 13h15 devant la quatrième chambre du tribunal judiciaire de Bordeaux. L’homme d’affaire Bernard Magrez, propriétaire de 43 domaines viticoles dans le monde et plus de 1 000 hectares de vignobles, assis sagement sur le banc, attend, seul, dans la salle d’audience, visage impassible, silhouette courbée.

13h30, Denis Roucou, le président de la quatrième chambre, appelle à la barre le prévenu : nom, prénom, âge, profession. « Quels sont vos revenus annuels ? » interroge-t-il. « Cela fait 67 ans que je suis chef d’entreprise. J‘ai du mal à vous répondre précisément » répond Bernard Magrez qui finit par lâcher un chiffre sans grande conviction : « 80 000 € par an ».

En quelques mots, le président rappelle l’affaire : une cabane de très belle facture de 75 mètres carrés répartie sur trois niveaux, baptisée « La cabane de l’émotion » a été construite au sommet d’un platane, à dix mètres de hauteur, dans le parc du château La Tour Carnet. Sauf qu’il n’y a jamais eu de dépôt de permis de construire.

Ouverte au printemps 2021 elle sera interdite de location d’hébergement à l’été de la même année par le maire de Saint Laurent du Médoc qui a découvert par un journal local, « Le Journal du Médoc », l’existence de cette cabane de luxe.

Aucune déclaration de travaux n’a été faite, pas plus que de demande de permis de construire. Par ailleurs la cabane est implantée dans une zone sensible du plan de Prévention des Risques Inondations (PPRI).

L’avocat de la défense, Maitre Michel Coicaud, va axer sa plaidoirie sur la procédure d’enquête qui n’aurait pas été régulière et sur la forme qui n’aurait pas été respectée et demande la nullité de la procédure. Ainsi les personnes habilitées à se rendre sur la propriété pour contrôler la cabane, auraient dû, selon l’avocat, en préambule, en informer le procureur de la république.

Deuxième problème : aucune indication n’aurait été donnée sur l’heure à laquelle les constations ont étés réalisées sur le site de La Tour Carnet. De même la présence d’une personne non qualifiée, interroge la défense. Outre les deux policiers municipaux, un « agent administratif assermenté » aurait été présent sur les lieux. Il n’avait rien à y faire selon Maitre Michel Coicaud. Enfin, ce dernier souligne que l’accès au château ne peut être effectué qu’avec l’assentiment écrit de l’occupant. « Or c’est le chef de culture qui n’est ni le représentant légal, ni l’occupant de la cabane qui a signé » indique-t-il. Et de conclure que la « procédure est entachée d’irrégularités graves ». Il n’y aurait donc plus rien à juger.

L’avocat de la commune qui s’est constituée partie civile, Maitre Lionel Bernadou, s’est attaché à démonter la plaidoirie de son confrère, notamment en indiquant qu’il n’était pas nécessaire d’avertir le procureur de la république pour un local à usage d’habitation. De même il n’a pas manqué d’insister sur le fait que l’homme d’affaires avait « essayé de se rattraper » en demandant un permis précaire. « Mais ça, c’est le dernier va tout quand on n’est pas dans les clous et qu’on espère une dérogation. Il n’était pas possible pour le maire de l’accorder ».

Un homme intelligent

Marc Ottomani, le procureur de la république va rejeter les demandes de nullités présentées par la défense. Rappelé à la barre, Bernard Magrez répond aux questions du président : « Vous êtes un homme intelligent, cultivé, conseillé par les plus grands avocats de Bordeaux. Qu’est ce qui fait que cette cabane n’a pas fait l’objet d’une demande de permis de construire ». « Ça m’est passé à côté. On m’a montré un devis. C’était très esthétique et cela servait l’œnotourisme dont Bordeaux a tant besoin. J’ai délégué » explique-t-il, voix sourde.

Le président insiste: « Vous avez signé pour cette cabane, avec une entreprise sérieuse. Personne ne vous a dit qu’il fallait un permis de construire ». Le procureur enfonce le clou : « Vous déléguez, vous ne pouvez pas être partout mais on ne reste pas 67 ans chef d’entreprise sans faire de travaux ». Bernard Magrez, se redresse, sa voix est plus forte : « Je ne vais pas faire venir ici mes collaborateurs. C’est moi le responsable ». Le procureur poursuit : « Ça vous parle un permis de construire ? Ça vous dit quelque chose ? ». Bernard Magrez reprend d’une petite voix : « je n’ai qu’un CAP de tourneur bois. C’est un triste début dans la vie »

Vient sur le tapis la question de l’implantation de la cabane et du local technique en zone inondable : sont-ils sur une zone rouge ou sur une zone jaune. La DDTM, la Direction Départementale des Territoires et de la Mer, victime dans ce dossier, affirme que la cabane a été érigée dans une zone rouge. Maitre Pierre Blazy qui défend également Bernard Magrez dans cette affaire, rappelle que cette cabane a été construite « dans un but d’excellence ». « On lui a présenté un modèle de cabane, il a signé un devis. C’est tout. Il ne s’est pas occupé du reste. Quand on est à son niveau, on avance ».

50 000 € d’amende

Il est 15h45 : le procureur de la république requière une condamnation de Bernard Magrez en tant que personne physique à une peine de 50 000 € d’amende dont 25 000 € assortis de sursis, publication dans le quotidien Sud-Ouest et dans le Journal du Médoc et la « totale mise en conformité des lieux dans un délai de six mois ». En clair, démonter cette cabane qui offrait chambre au design épuré, terrasse, vue imprenable sur le vignoble, le château. Bref « un séjour en altitude sans égal, apaisant et vecteur d’une reconstruction morale tellement recherchée » comme le vantait le groupe de Bernard Magrez.

A la sortie du tribunal, Bernard Magrez, n’a toujours pas digéré les propos que le procureur de la république, lui a adressé, dans le prétoire : « Vous êtes le naïf ». Une façon de lui dire qu’il n’en croyait pas un mot. « Je ne peux pas imaginer une seule seconde que vous ne saviez pas qu’il fallait une déclaration préalable, une demande de permis de construire ». Le délibéré sera rendu le 8 juin prochain à 14 heures.

 

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Tous les commentaires (5)
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lepaleocapridé Le 10 mai 2023 à 03:35:56
au visa des observations procédurales, ce dossier semble assez improbable
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lepaleocapridé Le 10 mai 2023 à 03:33:29
cela me rappelle une autre cabane sur l'eau, côté ferret, les propriétaires, négociants, avaient résisté longtemps, puis avaient du se résoudre avec une coquette somme à payer, mais là on est très loin de ce cas
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MG Le 05 mai 2023 à 07:59:59
Je ne connais pas M. Magrez mais on a vraiment l'impression en lisant l'article que le procureur a requis une amende en fonction de ses revenus et non de la faute commise ; cela est choquant. Sur le fond, un appartement construit sans permis, dans un arbre, dans une zone inondable, c'est une mauvaise comédie.
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Vigneron 21 Le 04 mai 2023 à 21:39:55
Aucune sympathie particulière pour cette personne que je ne connais pas mais quand on voit des délinquants et des casseurs multirécidivistes condamnés à des 1000 euros maxi, lorsqu'ils sont condamnés, on comprend que la justice n'est pas la même pour tous en France. Si vous êtes un citoyen honnête et bosseur, la moindre incartade est payée jusqu'au délire. Si vous êtes une racaille, pas de problème, continuez dans la quasi impunité avec les soutiens de toutes ces assoc pro racailles qu'on subventionne en plus avec nos impôts.
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Albert Le 04 mai 2023 à 19:26:24
Je n'ai aucune tendresse particulière pour M. Magrez mais, sur ce coup là, je me demande si notre Administration de Justice ne se mobilise pas bêtement. A priori, cette cabane est construite sur le domaine de La Tour Carnet .. mais alors où est donc le problème ? .. lamentable.
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