Germignac, en Charente-Maritime, Samuel Berthonnaud doit digérer l’agrandissement de son vignoble et la hausse du coût du gasoil. Il exploite 50ha en bio avec son père, sa sœur et son beau-frère. «Quatre temps plein pour 50ha en bio, ça commence à être limite, d’autant qu’on cultive aussi 75ha de céréales. Cette année, on va essayer de réduire le nombre de traitements.»
Cette idée lui est venue après l’essai réalisé chez lui en 2021 (*) avec l’association VitiBio Poitou-Charente, dont il est adhérent. L’objectif était de protéger les vignes avec 2kg/ha de cuivre métal maximum durant la saison. L’essai comprenait trois modalités : une avec du cuivre seul, deux avec du cuivre additionné de biostimulants. Pour tenir l’objectif des 2kg/ha, l’idée était de ne pas dépasser douze passages par saison, avec moins de 200g par passage en moyenne.
Cet objectif n’a pas pu être tenu. «En juin, il n’a pas arrêté de pleuvoir, se souvient Samuel. On a eu un gros départ de mildiou. On a dû faire deux traitements de choc à 400g/ha pour stopper l’attaque.» À l’arrivée : treize traitements, 2,8kg/ha de cuivre, et 15 à 20% de pertes de récolte dans l’essai. Pas franchement une réussite, mais pas une déroute non plus compte tenu de la virulence du mildiou cette année-là.
Sur le reste de son domaine, le vigneron a bien protégé ses vignes en appliquant 3,8kg/ha de cuivre en dix-huit passages. À l’époque, un tel programme, quoique lourd, lui paraissait normal. Avec la hausse des coûts de gasoil et l’agrandissement de son vignoble, il se doit de procéder autrement. «Chaque traitement nous prend 23heures de travail à deux tracteurs, calcule-t-il. On fait des grosses journées, sans coupure à midi. Dans ces conditions, ne serait-ce qu’un ou deux traitements en moins, cela représentera une économie importante de gasoil et de temps.»
Pour commencer, Samuel Berthonnaud va retarder au maximum le premier traitement, en s’appuyant sur le modèle qui tourne avec les relevés de sa station climatique. «L’an dernier, il y avait zéro risque lorsqu’on a fait le premier traitement, mais on y est quand même allé. Cette année, on va faire plus confiance à la station.» Partant de là, pour les premiers traitements, il appliquera des petites doses, qu’il renouvellera fréquemment comme à son habitude.
Puis, à partir de début juin, il compte monter à 400g par passage pour bénéficier d’une meilleure rémanence. «On ne renouvellera pas ces traitements après une petite pluie, si le temps se met au beau : on attendra l’annonce de la pluie suivante pour intervenir. On économisera ainsi des passages.»
Samuel Berthonnaud s’appuie sur le fait qu’un traitement au cuivre n’est jamais lessivé à 100%, même après 20mm de pluie. Léa Biseau, de la chambre d’agriculture de Charente-Maritime, confirme. «Des essais de l’IFV ont montré que si 50% du cuivre est lessivé dès les premiers millimètres de pluie, une partie reste sur la plante au-delà de 20mm. Toutefois, on ne sait pas la quantifier, ni évaluer son activité.»
Pour mesurer les risques qu’il prendra, Samuel Berthonnaud conservera des témoins non traités, et compte sur l’appui des établissements Landreau qui ont conduit les essais pour VitiBio en 2021. Il suivra aussi les essais de réduction de dose qu’un de ses voisins poursuivra cette année. Et afin de réduire les risques de contamination de la vigne par le mildiou, il s’équipe d’un rouleau Faca qui servira à coucher ses couverts au lieu de les détruire en travaillant le sol. «De façon à éviter l’effet d’éclaboussure de la pluie sur un sol nu», dit-il. En ces temps difficiles, tout avantage est bon à prendre.
(*) L’essai a été reconduit en 2022, mais a dû être interrompu après l’averse de grêle qui a détruit la parcelle.