our les fans, le rêve devient réalité. Il suffisait d'arpenter les allées du Vinitech ces 29, 30 novembre et 1er décembre à Bordeaux pour s'en rendre compte. Partout, des robots. Non seulement de nouveaux modèles apparaissent, à l'instar du Zilus de Sabi-Agri, mais en plus les anciens s'étalent : Vitibot a aligné sept Bakus sur son stand. Le manque criant de main-d'œuvre pousse les vignobles à forte valeur ajoutée à investir. D'après les déclarations que nous avons recueillies, 150 à 165 robots, achetés ou loués, travailleraient déjà dans les vignes. Et les fabricants s'attendent à en vendre autant en 2023. Plus qu'un virage, la réalité rattrape la fiction !
Robot Zilus de Sabi-Agri au Vinitech 2022 (crédit photo V. Gobert)
Fait marquant du salon, les séries remplacent les prototypes. C'était déjà le cas pour Bakus de Vitibot et Ted de Naïo. Début 2023, ce le sera aussi pour Jo de Naïo. Ce chenillard interligne sortira avec un attelage Boisselet d'une capacité de levage de 250 kg et pourvu d'une position flottante. Exit l'attelage Naïo qui équipait le prototype. Jo se voit également chaussé de chenilles agraires Mafroco. Enfin, le mât de guidage se replie vers l'avant pour que le robot rentre plus facilement dans un fourgon.
Le robot Jo au premier plan et le robot Ted en arrière plan de Naïo au salon Vinitech 2022 (Crédit photo V.Gobert)
Yanmar ajuste aussi son enjambeur de pulvérisation YV01. La rampe passe de deux à trois turbines. À la clé : une ventilation avec plus de peps et de régularité. En outre, une appli de pilotage du robot sur smartphone arrive, avec une planification des tâches jusqu'à quinze jours à l'avance. Forte de ces ajustements, la firme lance la fabrication d'une série en 2023. Six clients, surtout champenois, attendent déjà leur robot.
Robot YV01 de Yanmar au salon Vinitech 2022 (Crédit photo V. Gobert)
Exel Industries et sa filiale Exxact Robotics passent eux aussi à la fabrication de Traxx en série. Ils vont produire dix machines sur la base des derniers ajustements. La moitié est déjà réservée. Il n'y aura plus deux modèles spécialisés mais un seul polyvalent. Dételer les outils de travail du sol ou pour la pulvérisation ne prendrait plus qu'une heure. Autre changement majeur, le moteur ne carbure plus à l'essence, mais au diesel. Enfin, le montage des porte-outils passe du poussé au tiré.
Robot Traxx d'Exxact Robotics au salon Vinitech 2022 (Crédit Photo V. Gobert)
Moins avancés, la start-up Agreenculture et son partenaire industriel Pellenc envisagent de lancer une série au plus tôt à la fin 2023. Dans cette attente, deux nouveaux prototypes tournent déjà en test. Plus gros, avec une nouvelle forme, une nouvelle motorisation, des chenilles plus agraires, une centrale hydraulique ainsi que de nouveaux éléments de sécurité : le changement risque d'être profond. Seule constante, le robot reste pensé avant tout pour le travail du sol.
Robot Ceol d'Agreenculture au salon Vinitech 2022 (Crédit photo V. Gobert)
De son côté, Sitia ne communique que très peu. Le constructeur nantais aurait vendu 15 de ses Trektor, en France et à l'étranger. Pas uniquement pour la viticulture. Si l'on fait le compte, les Bakus seraient les plus nombreux en service -Vitibot annonce en avoir vendu au moins 60-, talonnés par les Ted.
Avec le passage aux séries, les constructeurs testent de nouveaux équipements : une rogneuse chez Exxact Robotics qui planche aussi sur une motorisation hydrogène, une prétailleuse Provitis et des modules d'épamprage chez Vitibot. Du côté de Naïo, des interceps électriques développés par Boisselet sont installés sur Ted. Enfin, Yanmar bosse sur le travail du sol avec des outils accrochés à l'arrière de son YV01.
Dans le même temps, le secteur se consolide. Cette année, le groupe Same Deutz-Fahr a mis la main sur Vitibot. Agreenculture a confié l'industrialisation de Ceol à Pellenc. De même, Naïo Technologies a placé la fabrication chez des sous-traitants : Syselec, près de Castres, et Kep Technologies, près de Sens. Les robots repassent ensuite à Toulouse pour vérifications et mises en route. Côté Traxx, Exxact Robotics confie la production à l'usine Préciculture, dans la Marne. Et, aux dernières nouvelles, Sitia recherchait un partenaire pour la production en série de ses Trektor.
Une dynamique est enclenchée en France. Elle dépasse nos frontières. Des acheteurs du monde entier sont venus au Vinitech voir les « robotistes ». À se demander si les futures stars de la robotique viticole ne seront pas frenchies, comme le sont déjà les stars de la machine à vendanger.
Agreenculture d’abord puis Naïo annoncent certifier le travail de leur robot sans aucune supervision humaine. Sur le Vinitech, la première lance un « geofencing », c’est-à-dire une clôture virtuelle délimitée par les points GPS RTK impossible à franchir pour le robot. De son côté, Naïo va aussi certifier l’usage de ses Ted sans supervision. « C’est prévu pour le mois de mars 2023 », explique-t-on sur le stand. Encore un peu de patience pour en savoir plus. Point d'attention : ce genre de certification ne donne qu'une information sur le niveau de risque lié l’utilisation d’une machine. Il n'autorise pas de les laisser travailler seuls dans une vigne. La filière de la robotique attend une réglementation européenne sur l'utilisation de robots sans supervision humaine. En France, France Expérimentation doit conduire des essais pour obtenir des références à ce sujet.