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"Le gobelet est le système de conduite des vignes le plus résistant au réchauffement"
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Interview
"Le gobelet est le système de conduite des vignes le plus résistant au réchauffement"

Kees Van Leeuwen, professeur à bordeaux Sciences Agro et chercheur à l’Institut des sciences de la vigne et du vin (ISVV) de Bordeaux, prône la conduite en gobelet, dans les vignobles du Sud, pour s’adapter au réchauffement climatique sans avoir recours à l’irrigation.
Par Aude Lutun Le 28 octobre 2022
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Kees van Leeuwen professeur de viticulture et d’œnologie à Bordeaux Sciences Agro et chercheur à l’ISVV prône la conduite en gobelet pour s'adapter au réchauffement climatique - crédit photo : DR
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elon vous, l’une des solutions pour s’adapter à la sécheresse est la conduite des vignes en gobelet. Elle n’a pourtant plus trop la cote…

Kees Van Leeuwen : En effet, la taille en gobelet est le système le plus résistant à la sécheresse et aux températures élevées, et tout le monde semble l’ignorer ! On trouve des articles scientifiques sur tous les modes de conduite, sauf sur la taille en gobelet. On a parfois l’impression que "le gobelet, c’était la taille du grand-père, et qu’il faut aller de l’avant !". Or, en matière d’adaptation à la sécheresse, il faut s’inspirer de ce qui marche dans les régions chaudes, comme dans l’appellation Cariñena en Espagne, plutôt que de céder à la facilité de l’irrigation. La contrainte hydrique n’est pas un problème pour la production de vins rouges de qualité si le matériel végétal et les modes de conduite sont adaptés aux conditions sèches.

 

En quoi le gobelet est-il adapté au changement climatique ?

Avec le gobelet, le feuillage protège bien les grappes de la chaleur, sans que ces dernières soient enfouies dans une végétation trop épaisse, comme cela peut être le cas dans des vignes larges et vigoureuses conduites en espalier. Concernant la contrainte hydrique, la vigne en gobelet est le plus souvent conduite à des densités moyennement faibles, de 3 500 à 4 000 ceps/ha. À ces densités, la surface foliaire par hectare n'est pas très élevée. L'interception du rayonnement est donc quelque peu limitée. Or, c'est l'interception du rayonnement qui tire la transpiration. De ce fait, la vigne transpire moins – en quantité d'eau par hectare –, elle est donc plus économe des réserves en eau du sol.

 

Si les vignes en gobelet disparaissent, c’est qu’elles ne sont pas mécanisables !

Oui, c’est vrai. Le principal inconvénient est l’impossibilité de vendanger à la machine. Tant qu'on n'aura pas développé une machine à vendanger adaptée au gobelet, les viticulteurs continueront à l'arracher. On dépense des millions pour développer l’irrigation, on devrait pouvoir consacrer un budget pour travailler avec des constructeurs sur ce projet. C'est vraiment la clé pour la pérennité des gobelets.

 

Pourquoi dire que l’irrigation, c’est la facilité ?

C’est une réponse à court terme. On augmente ou on maintient ses rendements avec l’irrigation, mais dans dix, vingt ou trente ans, quand la question de la répartition de l’eau va se poser, la vigne passera logiquement après les cultures vivrières ou les centrales nucléaires. Et on aura alors un vrai risque de disparition de la vigne dans certaines régions et une perte de savoir-faire millénaire. Nous sommes plusieurs scientifiques à avoir publié une tribune à ce sujet dans Le Monde du 12 octobre.

 

N'est-ce pas dangereux, économiquement, de préconiser une faible densité de plantation et de faibles rendements ?

Non, c’est le système extensif par excellence, avec un rendement faible, peu d’intrants et un faible coût de production. Ce n’est pas, bien sûr, la réponse à tout. C‘est un système qui est très vertueux écologiquement car on peut facilement se passer de désherbant en faisant un griffage croisé. Son modèle économique convient bien aux régions où le foncier ne coûte pas trop cher et où la vigne arrête de pousser vers la mi-juillet. La conduite en gobelet pourrait même devenir un argument commercial en mettant en avant son caractère durable.

 

La baisse de la densité est-elle à encourager ?

Oui, la baisse de la densité des vignes palissées peut être une autre option. J’ai été, il y a vingt ans, un adepte des fortes densités. J’ai changé ma position avec l’élévation des températures et l’augmentation des périodes de sécheresse. Je ne recommande pas 3 000 pieds par hectare partout. Il n’y a pas de réponse unique. Dans les régions où le prix du raisin n’est pas très élevé, la baisse de densité, de rendement, de surface foliaire, de coûts de production et de besoins en eau est une option intéressante.

 

Le matériel végétal est un autre levier important. Quels porte-greffes conseillez-vous ?

Le 110 Richter est très résistant à la sécheresse et il est qualitatif. Il pourrait être utilisé dans les sols pauvres et graveleux de Bordeaux par exemple. Dans les situations plus extrêmes, le 140 Ruggeri est encore plus résistant au stress hydrique que le 110 Richter. Ces porte-greffes garantissent, par ailleurs, un très bon niveau de rendement. Dans le cadre du dispositif « Écophysiologie et génomique fonctionnelle de la vigne », ma collègue Elisa Marguerit teste 55 porte-greffes étrangers, dont une petite moitié n’est pas homologuée en France, pour voir si certains sont intéressants à prendre.

 

Quels sont les cépages adaptés ?

Sans surprise, le grenache se comporte très bien en situation de stress hydrique, de même que le mourvèdre, le carignan et le cinsault. À l’inverse, le tempranillo, le merlot ou la syrah ne sont pas tolérants à la sécheresse. Il faut choisir son cépage selon la réserve utile du sol.

 

Le merlot aura-t-il encore sa place à Bordeaux ?

Bien sûr ! Il représente 65 % de l’encépagement en rouge car il va bien dans tous les sols. D’ici vingt ans, il faudra probablement faire baisser cette proportion à 50 %, au profit du cabernet franc et du cabernet sauvignon. Autrefois ces deux cépages mûrissaient difficilement. Ce n’est plus le cas.

 

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Tous les commentaires (5)
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VignerondeRions Le 04 novembre 2022 à 16:58:19
Adepte des vignes à forte densité il y a 20 ans, vous nous avez entrainé dans une mauvaise direction. Avec des surfaces folières importantes, des portes greffes soufreuteux. Or il y a 20 ans on parlait déjà du changement climatique, et nous avons dû nous battre comme des chiens pour sauver nos vignes larges, contre une batterie de scientifiques et chercheurs. Je ne parle même pas des injonction de palissage de certains cahier des charges. Pour info, j'espère et je fais en sorte que mes vignes plantés il y a 20 ans puissent en faire 20 à 30 de plus. Quand je me battait, j'ai expliqué de nombreuses fois que nos anciens n'étaient pas plus bête que nous, que nous pouvions imaginer des améliorations, mais que tout rayer d'un trait de plume était une connerie monumentale, il semble que ce soit acté. Donc on réinvente l'eau chaude, pardon le gobelet qui a sûrement été un choix guidé par des années d'observations minutieuses (sans ordinateur, sans microscope, sans GPS) mais avec des résultats probants. Pour finir je me demande aussi pourquoi on cherche désespérément à éradiquer les sélections massales historique (en les privant des aides à la restructuration), qui avaient une résistance aux maladies du bois inégalés. Il y a des vignes de 60/70 ans qui ne bougent pas alors que les nouvelles crèvent de peur... En conclusion dans cette histoire, c'est toujours les vignerons les dindons de la farce. Ceux qui paient et assument les choix des autres... Au moins vous reconnaissez votre erreur, faute avoué...
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Leclerc Le 04 novembre 2022 à 04:46:34
Aprés vérifications, voici ce qu'il en est de la D.O.C. Carinena, donnée en exemple : - soit dans sa partie basse (400 à 600 m) il ne pleut, effectivement, que 350 mm par an .. mais alors l'irrigation est largement répandue, et avec intelligence et succès ... sur une opportune couche d'argile cachée par les cailloux (comme à Châteauneuf du pape) -soit, dans la partie haute (800 m) il n'y a, effectivement, pas d'irrigation, mais c'est parce qu'il y pleut d'avantage et surtout MIEUX. "Le site catalan Décantelo.com donne des chiffres : 550 mm de pluviométrie, soit autant qu'à Perpignan, Marseille, Sicile, .. (et plus qu'à paris !) avec une meilleure répartition sur l'année, ce qui est absolument essentiel. - Ceci ajouté à une notoriété multiséculaire (remarquablement détaillée par Hervé Lalau, et illustrée par la construction spéciale d'une voie ferrée pour acheminer ces vins jusqu'à la gare de Saragosse dés 1887 !) - et à une altitude qui apporte : baisse des T°, amplitude nuit/jour, et plus de rayons U.V., garanti à cette D.O.C. une occupation durable du créneau "excellents rouges à forts degrés". En fait, la Carinena est une excellent référence, mais pour les vignes en altitude ... malheureusement condamnées en France sous la houlette d'une des cosignataires de la tribune du "Monde" du 12 octobre, aux côtés de M. Van Leewen.
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pg Le 03 novembre 2022 à 19:45:48
je trouve ce scientifique plein de bon sens.... Mon ?nologue, est du même avis. Il conseille un vignoble en Turquie, en zone méditerranéenne. Il sait de quoi il parle... S'imaginer que l'on pourra irriguer jusqu'à Bordeaux , voir même à Cognac, comme certains le voudraient et le clament , est à la limite de la décence. En diminuant la surface foliaire , on diminue la synthèse des sucres ... Et donc le taux d' alcool. D'où le gobelet. Ensuite , on peut toujours vendanger plus tôt et ne pas attendre que les raisins soient à 15 degrés potentiels.
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Leclerc Le 01 novembre 2022 à 02:56:04
Merci pour avoir enfin dévoilé le coin d'Espagne atypique qui serait un modèle de non-irrigation : la DOC Carinéna. - Sur le plan commercial : suggérer sans réserves la production de vins rouges à degrés élevés paraît osé, de nos jours. Le marché n'est pas immense et semble en rétraction durable. Bien sûr, ceux qui y sont depuis prés d'1 siècle avec une AOP déjà prestigieuse à l'époque (comme Carinéna, Chateauneuf du Pape, ....) s'en sortent bien. Mais pour les nouveaux venus, c'est déjà très-très dur, et cela semble devoir le devenir de plus en plus, surtout pour des nouveaux à venir.. - sur le plan économique : il serait responsable d'annoncer le niveau de rendement / ha qui est espérable : 30 ou 35 hl en moyenne ? Avec des chutes à 25 ? Il serait aussi honnête d'annoncer que cette région a la forte particularité d'être encore trés majoritairement en coopératives. Avec donc des coûts de vinification, de commercialisation, et de conseils techniques, amortis sur de gros volumes. - sur le plan de l'exactitude : j'ai de gros doutes sur le fait que la DOC Carinena ne pratique pas l'irrigation : "La Libre Belgique" donne, via Google, l'impression exactement contraire, sauf pour les vignes en altitude marquée (jusqu'à 800 / 850 m) parce qu'elles ont plus de pluies ! Le seul domaine en vente à ce jour sur Internet annonce "173 ha avec irrigation".... Le beau modèle du "vin des pierres non irrigué" mérite vérifications. Il ne faudrait pas mélanger ce qui est dû à l'altitude (amplitude nuit/jour, U.V., ....) et ce qui est dû à la non-irigation. Enfin, la lecture de la tribune collective publiée dans "le Monde" du 12 octobre, sur le même sujet et avec (entre autres) le même auteur est trés instructive .... Il y est notamment question d'un "griffage croisé" qui me semble peu compatible avec 4 000 pieds / Ha, sauf à passer patiemment 2 fois partout avec de tout petits griffons ...mais je sors, là, de mon domaine de compétence !
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Pierre Moureu Le 28 octobre 2022 à 18:55:20
Je suis en secteur septentrionale & 50% de mes vignes sont Gobelet les vignes sont superbes ceux en guyot ont souvent la baguette sèche et ont du mal à se développer. Mais il faut reconnaitre que la baguette est utile pour lutter contre le gel se sont les bourgeons du bout qui prennent donc il faut des gobelets un peu long.
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