amille Mourgues Berguedieu, oenologue-conseil pour le laboratoire Enosens de Grézillac, en Gironde, a perdu l’odorat trois jours après son infection par le Covid-19 en avril 2021. « Je distinguais encore le sucré, le salé, l’acide, l’amer et l’umami mais je ne reconnaissais plus les saveurs ».
Inquiète, la jeune femme a tout de suite pris contact avec une orthophoniste. Elle voit désormais en plus une olfacto-thérapeute déjà spécialisée dans l’anosmie et l’agueusie avant la pandémie. « Elle tente de stimuler mes sens, en me faisant par exemple sentir l’odeur du citron pendant que je regarde une image du fruit, associée à ses descriptifs ».
Deux fois par jour, Camille Mourgues Berguedieu s’entraine sur 5 odeurs, soit 70 par semaine. « J’ai fait des progrès et suis capable de goûter des vins, mais ne suis pas encore en mesure de conseiller finement mes vignerons par la dégustation ».
Ses collègues l’ont beaucoup épaulée, notamment lors des vendanges. Camille Mourgues Berguedieu a tenté de compenser en faisant plus d’administratif et en renforçant sa présence au laboratoire.
Après des rendez-vous réguliers avec sa direction, elle a pris depuis ce 1er septembre une nouvelle fonction. « L’organisation devenait trop compliquée vis-à -vis de mes clients. Mais Enosens ne m'a jamais abandonnée. Je suis désormais développeuse commerciale pour le groupe. Je dois faire rayonner la marque et mieux faire connaître les différents services du syndicat, proposant des prestations œnologiques et analytiques, viticoles, de paie, ou de comptabilité ».
Peu témoignent, mais le Covid-19 a chamboulé la vie professionnelle de nombreux professionnels du vin (cavistes, vignerons, œnologues, sommeliers...). Un handicap méconnu, que souhaite faire reconnaître comme maladie professionnelle l'Union des œnologues de France. D’après une enquête réalisée entre mai et juillet 2020 auprès de 2 526 œnologues ou sommeliers, 68 % de ceux infectés par le Covid-19 avait perdu l’odorat après la première vague. 56 % avait également perdu le goût. 61% ont vite retrouvé leurs capacités en moins d’un mois, mais 38 % du total des professionnels touchés ont reconnu en souffrir dans leur vie professionnelle.
L’enquête mettait par ailleurs en avant une plus grande proportion de femmes infectées, 4 % des sondées ayant contracté la Covid-19 contre seulement 2 % des hommes, 54 % des professionnelles contaminées ayant perdu l’odorat contre 46 % des professionnels hommes, 55 % d’entre elles le goût contre 52 % des hommes.