Le protocole de l'étude et la méthode me semblent fiables. La publication fait notamment état de résultats équivalents entre les méthodes GC-MS, LC-MS, HPLC et Elisa, montré par plusieurs autres publications » assure Vincent Bouazza, Responsable Unité Analyses Fines des laboratoires d’œnologie Dubernet, interrogé par Vitisphere sur les premiers résultats de la campagne glyphosate.
De 2018 à 2020, 6 848 prélèvements d’urine ont été réalisés sous contrôle d’huissier puis analysé par laboratoire allemand Biocheck via un test Elisa. Les résultats de la campagne viennent d’être publiés dans la revue Environmental Science and Pollution Research.
Ils indiquent que la molécule est présente dans l’urine de 99 % de la population française, avec des niveaux plus élevés chez les hommes, les agriculteurs, et particulièrement ceux travaillant dans un environnement viticole.
« Les limites de quantification sont très basses : 0,075 ng/mL soit moins de 0,1 µg/L. A titre d'exemple, en France le glyphosate est généralement recherché dans les vins avec des limites de quantification de l'ordre de 10 à 50 µg/L » poursuit Vincent Bouazza.
Les conclusions tirées de l'étude par ses commanditaires lui semblent en effet trop marquées. « Si on regarde par exemple la conclusion sur la consommation de nourriture bio, ils disent que les participants déclarant manger à plus de 85 % bio présentent des teneurs inférieures que les autres participants. Or en regardant les données, les résultats sont de 1,17+/- 0,80 pour ceux qui ne mange pas du tout bio, 1,19+/-0,84 pour ceux mangeant bio, 1,21+/-0,85 pour ceux mangeant moins de 85% bio, et 1,16+/-0,80 pour ceux mangeant plus de 85 % bio, détaille le scientifique, concluant que les tous ces résultats sont identiques en tenant compte de l’écart-type. Ils auraient aussi bien pu dire dans ce cas que le niveau est plus bas pour les personnes ne mangeant pas bio du tout (1,17) que pour les personnes mangeant bio (1,19) ! » illustre Vincent Bouazza.


Pour les agriculteurs et les viticulteurs, il reconnaît que la différence est un peu plus perceptible : 1,29 et 1,56 respectivement contre 1,19 en moyenne nationale. « Mais elle reste du même ordre de grandeur, et il serait intéressant de connaitre l'âge des agriculteurs et/ou viticulteurs ayant participé à l'étude. En effet la moyenne générale des 16-39 ans est de 1,44 µg/L et celle des 40-49 ans est de 1,26µg/L, donc plus vraiment différente de celle des agriculteurs s'étant porté volontaires qui doivent majoritairement se situer dans ces tranches d'âge ».
Vincent Bouazza suppose en outre que ces prélèvements sont majoritairement issus d’hommes, dont la moyenne est également plus élevée que la moyenne nationale.
Pour lui, les conclusions de l’étude sont à prendre avec des pincettes. « D'une part on parle de niveaux extrêmement faibles, et d'autre part la présentation des résultats peut être orientée pour faire dire aux chiffres ce que l'on souhaite mettre en avant ».