omparant les effets sur la biodiversité de parcelles en agriculture biologique et en conventionnel, Adrien Ruch, chargé de recherches à l’Institut National de la Recherche pour l’Agriculture et l’Environnement (INRAE), désamorce d’emblée tout débat piégé lors du douzième forum environnemental du vin de Bordeaux, ce 7 décembre au palais des congrès. « L’idée n’est pas d’opposer les systèmes, mais de rentrer dans une diversité de pratiques » pose le chercheur, ayant suivi les effets de l’agriculture biologique sur la biomasse microbienne, les vers de terre, des carabes…
Résultat sur 40 parcelles de l’Entre-deux-Mers et du Libournais, « il y a des effets positifs et négatifs sur les taxons souterrains. Il n’y a pas de réponse unique de la biodiversité aux pratiques viticoles de l’agriculture biologique. Certains taxons sont favorisés, d’autres non » indique Adrien Ruch, précisant qu’« au global, il y a une meilleure conservation des espèces si l’on prend l’ensemble des chaînes trophiques*, mais on voit que des groupes, comme les carabes ou les vers de terre, répondent négativement aux pratiques de l’AB. Notamment en raison du travail du sol. »
Martelant qu’il n’y a pas de réponse unique de la biodiversité aux pratiques de l’AB, le chercheur appelle à rentrer dans le détail des pratiques viticoles, indépendamment des certifications afin de réduire la pression sur la biodiversité. Les études de l’INRAE indiquent ainsi que l’intensité du travail du sol a un fort impact sur les populations de vers de terre (corrélées négativement avec une gestion croissante de l’inter-rang), tandis que l’abondance de carabes pâtit des insecticides (pour des Indices de Fréquence de Traitement croissants) et que le cuivre dans le sol touche les collemboles (des arthropodes). « Il est possible d’avoir des recommandations pratiques réduisant les effets sur la biodiversité » indique Adrien Ruch, notant qu’une « bonne connaissance des pratiques et infrastructures agroécologiques favorise la biodiversité dans les paysages viticoles ».
Notant qu’il y a de nombreuses raisons d’œuvrer à la conservation de la biodiversité (morales, esthétiques, patrimoniales…), Adrien Ruch met l’accent sur des raisons fonctionnelles : « la biodiversité est le moteur de l’écosystème, tant sur le plan écologique que socio-économique ». En témoignent les chiroptères, avec 70 % de fèces de chauve-souris positifs aux tordeuses des vers de la grappe d’après une étude de l’INRAE. « Quand on regarde perforation des baies issues des tordeuses de la grappe, on constate que l’on a des perforations plus basses quand on a une activité insectivore plus importante. En résum » : si on favorise la présence des chiroptères, on diminue significativement l’intensité des dégâts » pointe le chercheur.


Autre exemple concret avec les araignées, « des prédateurs de ravageurs du vignoble » note Adrien Ruch, qui note qu’« en augmentant la diversité végétale à l’intérieur des parcelles, on augmente significativement les réseaux trophiques supérieurs : biodiversité d’insectes et d’araignées. Ce se retrouve dans bénéfices en matière régulation des œufs de tordeuses. »
* : « L’AB favorise la diversité et l’abondance multitrophique, mais tous les groupes fonctionnels ne sont pas favorisés » précise Adrien Ruch.