etraité depuis 10 ans, Pierre Leclerc ne manque pas d’idées pour l’avenir du vignoble méditerranéen. À commencer par réfléchir sur les effets de la montée en altitude de vignobles. Pour l’ancien directeur du comité économique des vins du Sud-Est (CEVISE), les dizaines de domaines exploitant actuellement des vignes à plus de 400 mètres d’altitude doivent inspirer des essais. « Planter en hauteur permettrait de revenir aux températures moyennes du vingtième siècle (en perdant 0,65°C par 100 m) et à des localisations ancestrales (du Moyen-Âge à la crise phylloxérique, les vignes montaient jusqu’à 600 mètres sur l’arc méditerranéen français) » avance Pierre Leclerc, qui indique que l’hypothèse n’est pas explorée scientifiquement à sa connaissance (mais elle est testée en Catalogne depuis des années, notamment par les vignobles Torres).
Préconisant des montées à altitudes modestes (+300 à +600 mètres), le connaisseur de la filière viticole regrette que cette piste de travail semble écartée par la stratégie de la filière viticole pour son adaptation face au changement climatique. « Ce plan stratégique ne suffit qu’à répondre au scénario climatique le plus optimiste du GIEC. Avec lui on peut tenir le coup pour +2 °C en 2100 (sur la température terrestre globale). On a déjà +1,2°C. Se laisser une marge de 0,8°C pour 80 ans, c’est non seulement étroit, mais aussi trop optimiste. Au-delà de 2°C, on ne sait pas faire avec cette stratégie » pointe Pierre Leclerc. Pour qui la plantation en basse montagne permettrait de revenir à des altitudes modestes et séculaires, mais ne tenant pas du nomadisme. Ce serait plutôt un déplacement dans l’arrière-pays, comme en Hérault vers la haute vallée de l’Orb et le haut des terrasses du Larzac.


Se pencher sur cette hypothèse d’adaptation au changement climatique doit réparer un oubli indique Pierre Leclerc, qui souligne le manque de cartographie de ces zones, ainsi que la nécessité de déterminer les zones gélives (notamment en cas d’absence de vent). Ces essais permettraient non seulement de déterminer si ces vignobles d’altitude encaissent mieux les changements climatiques, mais également de mesurer leur potentiel organoleptique en réduisant les degrés alcools sans techniques œnologiques. « Ce serait prudent pour l’avenir de faire ces tests » souligne Pierre Leclerc, pour lequel il y aurait également une piste de création de vignobles positionnés sur le haut de gamme et l’exception. Capables de faire rêver conclut le retraité.