ernier exemple en date : le Royaume-Uni, qui cite les vins américains sur une liste de produits potentiellement ciblés s’il devait appliquer des droits punitifs de 25 % dans le cadre du contentieux avec les Etats-Unis sur l’aluminium et l’acier. Reliquat de l’administration Trump, les droits qui frappent les exportations britanniques font actuellement l’objet d’une consultation par le gouvernement pour ajuster la liste de produits ciblés en représailles. Comme l’a précisé « Wine Drinkers UK », un groupe de pression contre la taxation sur les vins, plus de 100 millions de bouteilles de vins américains étaient commercialisées l’an dernier sur le marché britannique pour la consommation à domicile.
Et l’impact potentiel de ce même conflit plane toujours sur l’Union européenne, de même que le projet de taxation numérique. Comme l’a rappelé Albéric Bichot, PDG de la Maison Albert Bichot, le 20 juillet sur BFM, « il y a beaucoup de sujets dans la guerre commerciale mondiale que se livrent tous les Etats ». Pour rappel, le contentieux Airbus/Boeing a entraîné une chute des importations américaines de vins français de 450 millions d’euros entre octobre 2019 et mars 2021.
Autre exemple de l’impact dévastateur des mesures de rétorsion sur le secteur du vin : l’Australie, où les opérateurs devraient subir une perte d’au moins 1,5 milliard d’euros pendant les cinq années d’application des droits anti-dumping en Chine. Un rapport publié en juillet par le bureau australien des statistiques agricoles ABARES estime que la réorientation des exportations et la baisse de leur valeur unitaire devraient entraîner un recul de 300 millions d’euros de la valeur des exportations australiennes en 2025. S’en suivra une foule de décisions que devra prendre la filière, au niveau de l’encépagement, du mix conditionné/vrac et des nouveaux marchés à prospecter. Rappelons que la Chine absorbait 1,18 million d'hectolitres de vins australiens lors du pic en 2018, et 33 % des valeurs à l’export en 2020. La perte par l’Australie d’un marché très lucratif entraînera donc obligatoirement un repositionnement de l’offre vers des vins en entrée ou en milieu de gamme et donc une rentabilité très affaiblie, et même une baisse de la production, selon les prévisions d’ABARES.
La concentration des exportations australiennes – cinq marchés représentant environ 75 % des expéditions – ne facilitera pas la diversification des débouchés. L’ironie cruelle de la décision chinoise, c’est que la Chine a imposé des droits anti-dumping alors que les vins australiens étaient parmi les mieux valorisés sur le marché chinois. En effet, seule la Nouvelle-Zélande vend ses vins plus cher en Chine, avec un prix unitaire au litre de 7,90 €, contre 7,20 € pour l’Australie, 4,60 € pour la France et même 2,35 € pour l’Espagne. Les représailles chinoises contre l’Australie – et les Etats-Unis – en disent long sur l’injustice des mesures de rétorsion contre le vin, tout en démontrant qu’elles ne devraient pas disparaître d’aussitôt.