ontrairement aux Italiens et aux Suisses, les viticulteurs Français n’ont encore jamais eu affaire à la cochenille farineuse Pseudococcus comstocki.
« Mais le risque est bien là. La cochenille provoque des dégâts dans les vergers du Languedoc et de la région PACA depuis 2005, en colonisant les fruits et en les salissant avec son miellat et ses cires blanches » prévient Etienne Herrbach, entomologiste à l’Inrae de Colmar.
Le chercheur s’inquiète aussi de la capacité du ravageur à transmettre de vigne en vigne le GLRaV-3, virus de l’enroulement, et le GVE, complexe du bois strié.
En Suisse, la cochenille gagne régulièrement de nouvelles communes du canton du Valais depuis 2015. « Nous avons observé des pontes dans des parcelles de vigne jouxtant des cultures de pommiers, poiriers et abricotiers colonisés par la cochenille en 2019 et 2020 » témoigne Christian Linder, de l’Agroscope de Changins.
Le chercheur suisse a suivi l’insecte dans trois vignobles, sur 16 ceps à l’interface immédiate du verger contaminé. « Nous l’avons piégé en plaçant du ruban adhésif double face à la base de deux sarments par cep et réalisé des relevés hebdomadaires de mi-avril à mi-juin » détaille-t-il. Jusqu’en septembre, Christian Linder a aussi recherché des nymphes dans le feuillage et sur les grappes.


Ses observations sont plutôt rassurantes. La cochenille n’a vraiment colonisé qu’une seule des trois parcelles et elle ne s’y est pas installée durablement. « En 2019, nous y avons capturé 420 individus. L’année dernière, nous n’en avons compté que 5 » indique Christian Linder.
Sur cette parcelle, des insectes ont été capturés sur 94 % des ceps contrôlés mais un seul a concentré plus de 85 % des populations, confirmant que la cochenille hiverne de manière très diffuse et hétérogène. « En mai 2019, le pourcentage d’occupation du feuillage a atteint un maximum de 31,2 %, avec une densité moyenne proche d’une cochenille par feuille » reprend le chercheur.
Durant l'été, lors d'un contrôle sur 160 feuilles à l'interface, puis à 10, 35, et 70 mètres du verger, Christian Linder a retrouvé des individus à toutes les distances. « Mais 90 % étaient concentrés sur les ceps situés à proximité immédiate des poiriers ».


Fin août, le ravageur n’occupait que 4,4 % de la végétation, soit 0,05 cochenille par feuille. « Et nous n’avons en avons jamais observé sur grappes ». Christian Linder pense que les traitements obligatoires réalisés dans les parcelles arboricoles voisines ont contribué à diminuer les populations de cochenilles.
Selon lui, P. comstocki ne présente pour l’heure pas plus de risques pour le vignoble que les autres cochenilles farineuses déjà identifiées. Il pense que les dégâts signalés en Italie en 2019 et 2020 sont liés à la forte présence de l’insecte sur des plants de mûrier (Morus sp.) « une variété qu’il apprécie tout particulièrement ».
En prévision d’une éventuelle colonisation des vignes françaises, l’Inrae de Sophia Antipolis s’est déjà mis en quête d’espèces de parasitoïdes capables de l’éliminer.