Au moment de la récolte, la tordeuse de la vigne eudémis (Lobesia botrana) est quatre fois plus présente dans les paysages simplifiés, dominés par la vigne, que dans les paysages complexes où les vignes sont entourées d’habitats semi-naturels, de haies, d’arbres, ou de murets » pose Daniel Paredes.
Ce chercheurs et ses confrères de l’Université de Davis, en Californie, viennent d’éplucher une base de données sur les densités de ravageurs de 2006 à 2018 dans 400 vignobles d’Andalousie. « Elle nous a été fournie par le gouvernement andalou par l’intermédiaire du réseau RAIF (Red de Alerta e Informacion Fitosanitaria). Leurs techniciens viticoles parcourent les vignobles chaque semaine pour mesurer les infestations d'eudémis et prendre connaissance des programmes de traitements des viticulteurs » rapporte Daniel Paredes.
Les chercheurs ont complété ces données avec des informations sur l’altitude, la pente, et l’aspect des vignobles. Ils ont aussi recueilli des données climatiques grâce à 79 stations météorologiques, et utilisé des cartes d’occupation des sols pour quantifier la quantité de forêts, d'arbustes, de prairies naturelles, de pâturages, de landes, de bruyères, de vignes, d'oliveraies et de céréales autour de chaque exploitation.


L’effet du paysage a varié selon la génération de la tordeuse. Par exemple, la présence de prairies a favorisé la présence du ravageur en première génération, il s’y est réfugié pendant l’hiver, alors que le seuil de nuisibilité de lobesia botrana a été plus souvent dépassé dans les exploitations en monoculture au moment des deuxième et troisième générations. « Les monocultures extensives permettent aux populations de nuisibles de se disperser rapidement. Et elles abritent souvent moins d’auxiliaires » rappelle le chercheur.
« Au moment des vendanges, en troisième génération, la probabilité de dépasser les seuils de pertes économiques passe de 2,5 % dans les exploitations non entourées par des vignes à 10 % dans celles entourées à 90 % par d’autres vignobles. Nous n’avons pas constaté le même phénomène sur les grandes surfaces d’oliviers ou de céréales » poursuit Daniel Paredes.
Résultat, par rapport à la moyenne, les applications d'insecticides ont doublé dans les exploitations accolées à d’autres vignobles sans mise en place d’habitats semi-naturels. Elles ont été moins nombreuses dans les vignobles entourés d'arbustes.
« Cela aurait pu simplement refléter les différences de valeurs des agriculteurs, les plus soucieux de la biodiversité choisissant de conserver des habitats non cultivés et s’abstenant de traiter. Mais nos résultats n’ont pas changé lorsque nous avons exclu de notre modèle les agriculteurs qui n’utilisent jamais d’insecticides de notre modèle » conclut le chercheur.