ue faire des raisins des ceps exprimant de l’esca ? Faut-il les faire tomber avant les vendanges ou peut-on les inclure à la récolte ? Dans le premier, le deuxième, ou le troisième vin ?
Pour obtenir les réponses à ces questions, douze propriétés de la rive gauche de Bordeaux mettent leurs parcelles les plus contaminées à la disposition de Vitinnov et de Bordeaux Sciences Agro depuis 10 ans.
« Nous avons réalisé des microvinifications sur cinq parcelles pendant deux millésimes » a indiqué ce 28 janvier Coralie Dewasme, ingénieur Bordeaux Sciences Agro, lors d’un webinaire dédié aux maladies du bois.
Les chercheurs ont écarté les raisins verts, roses ou flétris. Ils ont d’abord confirmé que les raisins issus des pieds présentant des symptômes d’esca murissent moins vite. « Nous avons aussi constaté un impact sur la maturité phénolique, avec une légère baisse des teneurs en anthocyanes, mais pas de différence sur les tanins totaux » reprend Coralie Dewasme.
Des experts ont dégusté les vins l’année suivant la récolte, en N+2 et en N+6. « Ils ont souvent jugés les vins issus des ceps atteints moins colorés et moins longs en bouche ». Pour autant, la présence ou non d’esca n’a pas eu d’impact sur l’appréciation globale des vins. « Dans certaines séries, ce sont même les vins issus des pieds malades qui ont été les mieux notés » affirme Coralie Dewasme.
Pour s’assurer que les raisins récoltés sur les pieds symptomatiques peuvent être réincorporés au reste de la vendange, les chercheurs ont assemblé des vins issus de pieds malades à des vins issus de pieds sains.
« Nous avons retenu 4 seuils : 0, 5%, 10%, ce qui correspondait au pourcentage moyen de pieds malades sur les parcelles les plus malades, ou 25% » précise Coralie Dewasme. Même à 25%, le jury de dégustateurs n’a noté aucun effet seuil.


Cette bonne nouvelle ne doit pas faire oublier l’impact de l’esca sur le volume de la récolte. « Nos pesées sur 8 parcelles et 5 millésimes ont montré une chute globale de rendement de 35% sur les ceps atteints par rapport aux ceps sains » reprend l’ingénieur. Le rendement a même chuté de 55% lorsque les pieds présentaient des symptômes pour la deuxième année consécutive.
« Nous avons aussi observé une perte de récolte de 30% entre les ceps sains et les ceps sans symptômes l’année N mais atteints l’année d’avant, et mesuré un taux moyen de réexpression de la maladie de 75% d’une année sur l’autre » détaille Coralie Dewasme.
Sa conclusion ? Mieux vaut complanter, surgreffer ou cureter les ceps dès l’apparition des premiers symptômes, et ce, même si les ceps ne sont que partiellement atteints. « Un bras sain sur un cep atteint donne 25% de raisin en moins qu’un bras d’un cep exempt de la maladie ».