ux grands maux, les grands moyens. Face à la succession des difficultés commerciales, culminant avec la pandémie de coronavirus : « soyons offensifs, mettons sur la table des sujets que nous savons utiles, mais que nous avons abordé frileusement ou timidement jusqu’à aujourd’hui » pose Bernard Farges, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), lors de son assemblée générale ce 15 juillet. Cumulant également les mandats de présidents de la Confédération Nationale des vins et eaux de vie AOC (CNAOC) et de la Fédération Européenne des Vins d’Origine (EFOW), le viticulteur bordelais se montre particulièrement enclin à rebattre les cartes de l’Organisation Commune de Marché Vitivinicole (OCM vin).
A commencer par les outils de gestion de surproduction. Alors que le débat d’un arrachage de vignes bordelaises se débat en milliers d’hectares à retirer, « les textes européens ne le permettent pas aujourd’hui, c’est un fait et il est indispensable de le rappeler. Toutefois, nous savons que cette piste, si elle est pensée, accompagnée, organisée, peut être utile à l’ensemble de la filière, ici à Bordeaux comme ailleurs en France ou en Europe » souligne Bernard Farges. Estimant qu’une telle campagne d’arrachage « peut accompagner des entreprises vers la cessation, le recentrage ou la diversification de leur activité, pour redonner aussi de la compétitivité en relevant les rendements à l’hectare », le viticulteur estime que « le financement de cette mesure peut se trouver dans le budget OCM ».


Dans l’équation de l’offre et de la demande, les aides OCM révisées par Bernard Farges doivent permettre de réduire le potentiel de production tout en relançant la commercialisation. Pour le coopérateur de l’Entre-deux-Mers, les aides européennes doivent soutenir prioritairement la commercialisation : « depuis 15 ans, nous avons investi lourdement : à la vigne avec des aides à la restructuration, et dans les chais avec des aides à l’investissement. La priorité n’est plus à ces sujets, au moins pour les deux ou trois années à venir. Aujourd’hui, nous devons collectivement faire le choix de diminuer les soutiens à ces investissements pour consacrer nos moyens à vendre, vendre, vendre. »
Bernard Farges souhaite également ouvrir les débats pour appuyer des contractualisations de long terme (sur 3, 5 ou 10 ans, avec de « vrais engagements de part et d’autre »), pour autoriser des discussions interprofessionnelles concernant les prix (« les règles de la concurrence nous l’interdisent », empêchant de « laisser les filières bâtir de vraies politiques de prix pour assurer la pérennité de leurs entreprises et de l’économie qui en découle ») et pour demander de nouveau la mixité entre bio et conventionnel au sein des exploitations (« si nous raisonnons cette mixité par îlots culturaux, nous verrons un grand nombre d’entreprises passer au bio sur une partie de leur vignoble. Nous ferons disparaître le débat stérile entre bio et conventionnel »).
Financement inchangé
Enumérant ces mesures éclectiques, Bernard Farges martèle qu’elle ne nécessitent pas de nouveaux moyens, mais de nouveaux cadres administratifs. « L’arrachage, les discussions sur les prix, la contractualisation, la mixité bio, l’orientation des fonds OCM vers plus de promotion, tous ces points ne coûtent rien de plus, mais nécessitent des évolutions réglementaires qui seront efficaces à la relance » résume Bernard Farges.
« Vous avez mis sur la table des sujets qui font régulièrement débat et ne suscitent pas d’emblée un consensus » souligne Renaud Laheurte, le directeur régional de l’agriculture et de la forêt, qui rappelle cependant la nécessité de bien avoir conscience des obstacles à lever. « Ces sujets doivent être discutés au niveau européen. Y-aura-t-il suffisamment de vignobles européens pour solliciter un dispositif d’arrachage ? Peut-on assouplir le règlement européen sur le bio sans baisser le niveau de garantie offert aux consommateurs et sans que cela ne se traduise par de la surrèglementation ? Sur la discussion des prix, le sujet est délicat : le chemin est étroit » prévient le fonctionnaire, validant l’orientation des aides OCM vers la promotion (« je pense effectivement qu’aujourd’hui le temps va être plus à la relance de la consommation et à la promotion qu’aux investissements capacitaires »).