Le titre de vin le plus cher du monde de Liber Pater n’aura duré que deux semaines à en croire le vigneron Mathieu Verdier (château Bessan, 16 hectares de vignes bio en AOC Cadillac Côtes de Bordeaux). Face au prix de vente de 30 000 euros la bouteille de Liber Pater 2015, il propose en ligne son millésime 2017 à 31 000 €. Normalement vendue 10 €, cette bouteille se moque clairement du positionnement tarifaire et des prétentions qualitatives affirmés par Loïc Pasquet, le créateur de Liber Pater en 2006. « Mon message est complément moqueur. J’ai fait goûter mon vin à ma maman, elle m’a dit que c’est le meilleur au monde, je peux encore en monter le prix » ironise Mathieu Verdier, pour qui « ces niveaux de prix frisent le ridicule . Il n’y a rien qui puisse les légitimer. »
Derrière le sarcasme, Mathieu Verdier reconnaît l’intérêt du positionnement ultra-différencié de Liber Pater, qui promet un vin préphylloxérique (avec des cépages et pratiques anciennes). « Je suis assez partagé sur Loïc Pasquet, que je ne connais pas. C’est un malin, il ne dit pas que des choses bêtes et surfe sur quelques bonnes idées. Mais la simplicité de son discours est incompatible avec l’image de son positionnement. Son prix le coupe du monde du vin et de ses amateurs » estime Mathieu Verdier, qui regrette que Loïc Pasquet ne soit pas le Banksy du vin, pour critiquer la spéculation d’une frange de la filière.


Pour Mathieu Verdier, le créateur de Liber Pater n’est d’ailleurs pas un vigneron : « quand on ne vendange pas plusieurs années de suite, on n’est pas un viticulteur dans la nécessité de produire pour vivre ». Cette sensibilité à l’urgence économique de la viticulture est d’autant plus forte que le vignoble bordelais est en crise. « C’est très triste de voir ceux qui bossent dans la vigne qui ne s’en sortent pas et n’arrivent pas à vivre. Nous sommes tous dans la même galère » conclut Mathieu Verdier, qui compte davantage sur le développement de son offre œnotouristique, un bar à vin baptisé la Cabane dans les Vignes, que sur la vente d’une bouteille à 31 000 €.