Si de nouvelles zones propices à la viticulture sont en émergence, comme le sud de la Grande-Bretagne, l’évocation de futurs eldorados de la viticulture mérite d’être soumise à un examen critique » alerte le professeur en sciences économiques Patrice Geoffron (université Paris-Dauphine), ce 14 mai durant le premier symposium Vinexpo (parc des expositions de Bordeaux). Présentant les conclusions de deux mois d’étude sur la filière du vin, le chercheur explique en effet que le changement climatique aura de multiples conséquences.
À commencer par une croissance des aléas, les phénomènes de gel, grêle, inondations… seront plus fréquents et n’épargneront pas les rendements de ces nouveaux vignobles. Le changement climatique aura aussi un impact sur les stabilités économiques et politiques mondiales, selon la mise en application de l’accord de Paris et la diffusion des nouvelles technologies à faible emprunte carbone esquisse Patrice Geoffron. Qui note que de nouvelles orientations de politiques énergétiques peuvent créer de fortes instabilités politiques, comme le mouvement des gilets jaunes en France, qui a suivi une hausse du prix de l’essence et anticipé une augmentation des taxes.


« Dans une économie mondiale plus instable du fait du changement climatique, le ferme ancrage des nouvelles zones de production n’est pas assorti de garanties » avance Patrice Geoffron, soulignant que la consommation mondiale de vin est très sensible à l’environnement international : la crise de 2008 a marqué une rupture dans la croissance de la consommation mondiale de vin, qui ne cesse de s’effriter depuis selon les données de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV). Sans compter que ce nouveau nouveau monde viticole se heurtera à la concurrence des vignobles existants (de l’ancien et du nouveau monde). En matière de scénarios prospectifs, « il n’y a pas d’un côté le paradis et de l’autre l’enfer » estime Patrice Geoffron.
Le chercheur note que malgré les adaptations du vignoble aux effets du changement climatique et ses actions pour réduire son empreinte carbone, « le futur de la filière vin ne sera pas défini par elle seule. Il s’agit d’un déterminisme exogène » dépendant de l’empreinte carbone de l’économie mondiale. Pour la faire évoluer à la baisse, la filière vin doit devenir un lanceur d’alerte estime Patrice Geoffron, ayant la capacité de montrer les impacts tangibles : « les données sur l’avancement des dates de vendange ou la montée en alcool des vins sont bien plus parlantes dans le public que des informations sur des milliards de tonnes de CO2 émises chaque année. »