’est une décision que le président tout comme les adhérents de la cave de Leucate ont du mal à digérer. Depuis sept mois, la coopérative audoise rembourse tous les mois 3 500 euros à France Agrimer pour un dossier d’aide à l’investissement que l’office agricole avait pourtant validé au moment de son dépôt. L’affaire remonte à 2009, au moment où la nouvelle Organistion Commune du Marché vitivinicole (OCM vin) met en place des aides à l’investissement pour les caves. La cave de Leucate, qui s’apprête à construire un tout nouveau chai, est la première à déposer un dossier de cette ampleur : l’investissement s’élève à 10 millions €.
« Nous avons préparé le dossier très en amont. A l’époque, j’étais très introduit à Bruxelles puisque j’ai présidé la Copa-Cogeca jusqu’en 2005. J’ai donc rencontré des fonctionnaires de Bruxelles, de la Région et de France Agrimer. Notre dossier est retenu, France Agrimer nous confirme que nous sommes bien éligibles à une aide de 3,2 M€ » raconte Joël Castany, le président.
Les travaux démarrent donc et en fin de chantier, factures à l’appui, la cave empoche la subvention attendue. La coopérative fera ensuite l’objet de cinq contrôles : d’abord de France Agrimer, puis de la Cour des comptes européenne, des Douanes et de l’administration française. Ces quatre premiers contrôles valident unanimement le bon respect des procédures. Le cinquième, réalisé par la Mission interministérielle, soulève un lièvre. Elle reproche aux dirigeants de Leucate de n’avoir pas déduit le montant de la vente des anciens locaux de la coopérative de l’assiette qui a servi au calcul de la subvention.
La cave est donc sommée de rembourser 800 000 €. Les dirigeants de la cave tombent des nues et, s’entourant des conseils d’un avocat, contestent cette argumentation, faisant valoir que quatre autres organismes de contrôle ont eu une interprétation différente du dossier. L’affaire traine en longueur et ce n’est que l’an dernier, suite à une dernière réunion infructueuse à France Agrimer, que la coopérative reçoit une mise en recouvrement formelle d’une somme ramenée à 200 000 €, sans plus d’explication.


« France Agrimer nous a déjà sucré une subvention de 50 000 € pour un autre dossier d’investissement que nous avions déposé et tous les mois nous remboursons désormais 3 500 € pour nous acquitter des 150 000 € restants » confie, amer, le président. « Rembourser 800 000 € aurait été insurmontable. 200 000 €, on va y arriver, l’édifice est solide. Mais l’effet est désastreux sur les coopérateurs. On a l’impression que tout est fait non pas pour nous accompagner dans ces démarches mais pour nous sanctionner. On traumatise les producteurs avec tous ces contrôles, notamment pour les aides à la plantation. Désormais pour la cave, c’est fini, nous ne demandons plus d’aides. On vient de s’équiper en filtration tangentielle, un investissement de 400 000 € qu’on a payé nous-mêmes » conclut Joël Castany.
Mais la cave ne baisse pas pour autant les bras. Elle a attaqué France Agrimer en justice.