i de premières négociations de référencement sont finalisées pour 2019, les discussions avec la grande distribution battent leur plein et sont marquées par une volonté des enseignes de faire baisser les prix après les hausses de 2018 (liées à la petite récolte 2017). Généralisée, cette approche se heurte à une disponibilité réduite de vins bio français. Leur production restant insuffisante par rapport à la demande d’un marché qui continue de progresser à deux chiffres.
« L’an passé, on rentrait facilement des gammes à des prix valorisés. Cette année, c’est plus bataillé… » témoigne Ludovic Fuhrmann, le directeur commercial de l’union commerciale bordelaise Terre de Vignerons (dont la marque Croix d’Albret est la première référence de Bordeaux bio en GD). Si les cours du vrac bio s’envolent, il est donc ardu de les répercuter dans les négociations sur le prix de vente des bouteilles. « Quand j’annonce des hausses de prix entre 4 et 6 %, ce qui correspond au marché, les enseignes veulent réduire drastiquement cette valorisation. Elles veulent maintenir l’accessibilité des vins bio. En répondant à l’afflux de demande avec un différentiel de prix réduit par rapport au conventionnel » explique Ludovic Fuhrmann.


Cette vision du positionnement en linéaires de l’offre bio ne se limite pas qu’aux vins. Alors que le coût des approvisionnements bio augmente dans toutes les filières, « la grande distribution met ses fournisseurs bio sous forte pression » alerte le Syndicat Réseau Entreprises BIO Agroalimentaires (SYNABIO, qui rassemble 200 entreprises de la bio, transformateurs et distributeurs spécialisés). Le premier observatoire des négociations commerciales de ce syndicat rapporte ainsi que « 28 % des entreprises bio se voient réclamer une baisse de tarif avant toute discussion » et qu’« à l’issue des premiers rounds de négociation, cet indicateur monte à 40 % ».
Éprouvant, ce rapport de force détourne des opérateurs bio conséquents des grandes enseignes nationales. « La GD souhaite s’emparer d’une nouvelle valorisation sans en payer la valeur. Ils laissent croire que l’on peut produire différemment à même coût » critique Frédéric Brochet, le fondateur du négoce ligérien Ampelidae, qui s’est désengagé des grandes enseignes nationales et mise essentiellement sur l’export pour développer son activité. Tout comme Claude Vialade, la présidente des domaines languedociens Auriol, pour qui « le marché bio se paupérise en grande distribution ».
Si la négociante témoigne de bonnes valorisations sur des réseaux spécialisés (comme Biocoop, Grand Frais ou Monoprix), Claude Vialade souligne que les grandes surfaces n’acceptent pas de payer les 10 à 15 % de surcoût de production de la bio par rapport au conventionnel. « Il faut que la GD comprenne qu’il y a autre chose à faire que de taper sur les fournisseurs. Il faut faire confiance et accompagner la transition écologique » plaide Claude Vialade, appelant au déploiement du nouveau logo de Conversion à l’Agriculture Biologique, pour que le vignoble occitan puisse répondre à la demande.
Dans le développement du linéaire de vins bio, le nerf de la guerre reste le volume. Face aux manques de disponibilité nationale, et aux hausses de prix, on entend déjà des échos d’enseignes prêtes à remplacer les vins bio d’IGP française de leurs marques de distributeur par des approvisionnements espagnols. Ce qui ne va pas faciliter les négociations, alors que les enseignes se plaisent à faire pression en comparant les prix de vente du vrac espagnol aux cours français.