’il est message martelé à l’oreille des journalistes lors de Terroirs et Millésimes en Languedoc qui se tient du 23 au 28 avril, c’est bien la marche constante du Languedoc vers la qualité et la hiérarchisation de ses vins d’AOC. Le Minervois est l’un de ces exemples. « Nous menons deux démarches parallèles » explique René-Henry Guéry, vice-président de l’appellation qui s’étend sur 3 400 hectares et produit environ 140 000 hl.
Première démarche en cours : la création de dénominations géographiques complémentaires avec Cazelles (un plateau calcaire) et Laure-Minervois (terres légères entre des résurgences de grès). En cours d’étude à l’INAO, ces dénominations visent à créer un intermédiaire entre l’appellation et le cru Minervois La Livinière, appelé à terme à devenir une AOC à part entière. Pour ces deux dénominations, l’objectif est de « parvenir à trouver une typicité identifiable pour ces vins d’assemblages » poursuit René-Henry Guéry. En attendant que la démarche aboutisse d’une validation officielle, les domaines se préparent. À l’image du Château Cabezac, qui dès l’initiation de la démarche, a créé le Mas Roc de Bô en 2012. La propriété, d’une vingtaine d’hectares (300 000 cols) est entièrement dédiée à la vinification des raisins de Cabezac issus du plateau de Cazelles.
Mais, la création de dénominations n’est pas la seule démarche en cours. « Dans cette réflexion, il est apparu qu’il y avait de nombreux vignerons qui pouvaient révéler des terroirs d’exception. Mais, ils sont trop souvent isolés » explique Jean-François Orsquette, responsable de la Commission hiérarchisation de l’ODG Minervois (Château Lagrave). Il était donc impossible de mettre en œuvre des démarches de reconnaissance auprès de l’INAO pour ces multiples situations remarquables. C’était sans compter la possibilité laissée par la règlementation européenne de mentionner les lieux-dits cadastraux, en respectant simplement la traçabilité. La demande est donc faite à l’INAO de pouvoir utiliser cette spécificité. « Nous demandons aussi d’adjoindre des conditions de production plus sévères, notamment en limitant drastiquement les rendements » indique Jean-François Orsquette. Sur ce point, il faut encore convaincre l’INAO. Cette segmentation veut également tenir compte du millésime. « L’obtention du lieu-dit ne sera pas automatique. Elle sera soumise à dégustation et pourra être accordée certaines années, d’autre non » précise Jean-François Orsquette.
Les premiers lieux-dits pourraient sortir d’ici trois ans, espère le Minervois. Et, si la démarche est concluante, ils devraient devenir des premiers crus, espère secrètement l’appellation. En tout état de cause, le Minervois illustre le dynamisme du Languedoc. Jérôme Villaret, directeur du CIVL d’expliquer : « Nous sommes le vignoble qui bouge le plus, c’est notre histoire d’innover ». Et de glisser, « les lieux-dits, ce n’est pas autre chose que les AOC d’excellence », conçues, voulues, espérées par René Renou. D’ailleurs, d’autres régions ne s’y trompent pas et regardent avec intérêt ce que le Minervois est en train de bâtir.