ans le vignoble, « l’idée reçue est que la quantité de raisins et la qualité des vins sont inversement reliées. D’après la bibliographie, c’est un peu plus compliqué… On trouve tout, et son contraire ! » lance Laurence Gény-Denis ce 9 mars, concluant la journée technique du cluster Inno’Vin. La chercheuse à l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin (Université de Bordeaux) tranche en deux temps et trois mouvements le lien entre quantité et qualité, ne serait-ce qu’en revenant sur les derniers millésimes girondins. Si 2007 n’est pas très bien noté alors que Bordeaux a connu de forts rendements, les contre-exemples ne manquent pas : petits rendements en 2013 et notes médiocres, alors que les forts rendements de 2005 n’ont pas empêché un accueil critique globalement positif.
Se basant sur une somme bibliographique moins triviale, Laurence Gény-Denis conclut qu’« il n’existe pas de lien direct et unique entre rendement et qualité ». Du moins dans les gammes de rendements pratiquées dans le vignoble français précise la scientifique (voir encadré). D’après son étude, la recherche démontre que les effets sur le rendement d’enherbement ou de porte-greffe n’entraînent pas une réponse linéaire pour les marqueurs qualitatifs. Par exemple, l’augmentation de la surface foliaire des ceps débouche sur une modification du rapport feuille/fruit, l’augmentation de rendement étant compensée par un maintien des indicateurs de maturité (sucre/acide).
Pour Laurence Gény-Denis, le lien entre rendement et qualité se trouve à la croisée d’autres facteurs plus impactants. « Les maturités dépendent plus du climat et du régime hydrique que du rendement » estime-t-elle, ajoutant que « les équilibres physiologiques et le microclimat contrôlant le développement de la plante sont plus importants que le rendement seul ».
Moins iconoclaste, le technicien Thierry Dufourcq de l’Institut Français de la Vigne et du Vin estimait durant cette conférence qu’« avec le rendement, l’objectif est d’optimiser, pas de maximiser ». Et de rappeler la fourchette de rendements que l’on trouve dans le vignoble français : de 5 à 8 tonnes de raisin par hectare pour les vins AOC, de 10 à 15 t/ha pour les IGP, de 10 à plus de 18 t/ha pour les vins sans indications géographiques ou les vins de base à eaux-de-vie (Armagnac, Cognac…).