Si la seule réponse aux importations de vins espagnols, c’est de les produire chez nous : au secours ! Se dire qu’il manque en France un vignoble pour concurrencer l’Espagne, revient à imaginer relancer la production de T-shirts pour rivaliser avec l’Asie du Sud-Est » s’exclame Bernard Farges, le président de la CNAOC (Confédération Nationale des Producteurs de Vin et Eaux-De-Vie de Vin AOC). Annoncé par le ministre de l’Agriculture pour la rentrée prochaine, le débat sur la filière française des Vins Sans Indication Géographique Protégée (VSIG, ou Vins de France) devrait autant regorger de formules piquantes que de positions tranchées.
Pour Bernard Farges, la filière a entériné depuis son plan stratégique 2025 l’absence de vignoble dédié au VSIG, sans y voir forcément un manque stratégique. Il en veut pour preuve la frilosité du vignoble à s’engouffrer dans cette nouvelle catégorie. « Qu’on ne nous dise pas qu’il n’est pas possible de créer une filière VSIG. En Languedoc-Roussillon et dans le Sud-Ouest, les deux régions les plus susceptibles de se lancer dans les VSIG, il n’y avait pas de contingents. L’accès était libre. La question est pourquoi n’y a-t-il quasiment pas eu de demandes ? » tranche le viticulteur bordelais.
Pour Bernard Farges, cette absence d’engouement témoigne d’abord du manque d’engagement du négoce pour assurer des débouchés aux vignerons : « il n’y a pas de contractualisations proposées ». Il souligne ensuite le poids de l’histoire pour le vignoble : « avec les vins de table, les vignerons ne gagnaient pas leur vie. C’est une viticulture de misère ! Est-ce que l’on a pensé à regarder comment les Espagnols vivent avec des cours à 35-40 €/hl ? » tacle-t-il, ne croyant visiblement dans la pertinence stratégique du développement de ces produits à faible valeur ajoutée.
Casquette AOC oblige, Bernard Farges reste attentif au sujet du détournement de notoriété. Regrettant que « des marques de négoce ayant créé leur notoriété sur les indications géographiques françaises en détournent les codes sur des vins sans IG », il souligne que « tout ce qui vient détourner de la notoriété est une perte de valeur pour l’ensemble de la filière ». Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a justement mis à l'ordre du jour de ce groupe de travail la distinction dans les linéaires des BIB selon l'origine de leurs vins.