ix responsables de caves coopératives languedociennes n’ont même plus à dépêcher de techniciens sur le terrain pour connaître le statut hydrique de leur parcellaire. Il leur suffit de prendre cinq minutes chaque semaine pour lire les trois pages du bulletin que leur envoie l’Institut coopératif du vin (ICV) et de le faire suivre à leurs adhérents. « Nous y résumons l’essentiel de la météo des jours passés en détaillant les cumuls de pluie et l’évapotranspiration enregistrés sur leur vignoble par un point Weenat », commence à lister Thomas Gautier, conseiller viticole participant au déploiement du nouveau réseau hydrique de l’ICV. « Et nous y interprétons les images prises par les satellites Sentinel qui survolent une quarantaine de leurs parcelles deux fois par semaine. Ces parcelles sont classées en situation de confort hydrique, de stress modéré ou de stress fort en calculant un indice corrélé au potentiel foliaire de tige à partir de certaines longueurs d’ondes captées par le satellite*. Cela permet de détecter le stress hydrique avant que les feuilles commencent à jaunir » poursuit-il. Ces données sont consolidées toute la saison par une stagiaire utilisant une chambre à pression et mesurant la croissance des apex sur une quinzaine de parcelles références.
L’ICV n’a pas ici la prétention d’aider les caves à piloter finement l’irrigation à la parcelle comme ses conseillers le font avec i-pilote, moyennant des sondes et des volucompteurs, mais de leur donner une tendance. « Notre discours peut se résumer à "il y a eu une bonne pluie vous pouvez stopper l’irrigation" ou "attention, la sécheresse persiste, l’évapotranspiration est importante, continuez" », déroule Thomas Gautier.
Les 8 bulletins envoyés, un en avril, puis de juin aux vendanges pour 1 000 €/an contiennent aussi des recommandations sur la stratégie hydrique à mener pour obtenir les profils de vins désirés et signalent les changements des mesures prises dans les arrêtés sécheresse. Avant le redémarrage de la saison, les adhérents du réseau hydrique reçoivent un autre bulletin faisant le point sur la recharge hivernale.
Couvrant aujourd’hui 500 hectares de Fitou dans l’Aude jusqu'au nord de la Vallée de l’Hérault, l’ICV ambitionne l’année prochaine de densifier son réseau autour de Béziers et du Pic Saint Loup, et d’aller chercher de nouveaux partenaires dans les Pyrénées-Orientales et le Gard afin de mailler tout le bassin Languedoc-Roussillon. « Le réseau hydrique s’adresse aux caves coopératives mais également aux ODG souhaitant apporter un service supplémentaire à leurs adhérents et bénéficier de soutien dans leurs demandes d'irrigation à l'INAO », termine Thomas Gautier.
* : Le suivi du statut hydrique de la vigne par télédétection a été mis au point lors de la thèse d'Eve Laroche Pinel soutenue en 2021.
Après un hiver bien arrosé, le printemps a été marqué par des pluies régulières, favorisant des attaques de mildiou parfois problématiques. « Les cumuls sont restées néanmoins inférieurs aux normales. Puis de mi-mai à mi-juillet, aucune pluie (en dehors de l'orage Margon-Alignan-Pézenas) et des températures élevées ont fortement accru l’évapotranspiration. La situation devenait inquiétante début juillet, mais l'orage du samedi 12 juillet a apporté entre 20 et 80 mm selon les secteurs. Dans l'ensemble les vignes sont vertes et vigoureuses : un bon signe pour la suite, mais il faudra encore quelques pluies avant les vendanges pour les parcelles de coteaux non-irriguées » décrit Thomas Gautier ce 18 juillet.
Graphique des données du réseau hydrique ICV pour l'Hérault: en courbe bleue, les cumuls de pluie hebdomadaires relevés par quatre point météo Weenat répartis sur le territoire ; en barres, l’état hydrique des 160 parcelles suivi par Oenoview Hyd, à partir d’acquisitions réalisées les 22 et 30 juin, puis les 2 et 10 juillet.