Sous les pavés la vigne", le salon des "vins actuels et naturels" a réuni à la Bellevilloise (Paris 11è) plus de 1 800 visiteurs. On y vient pour découvrir et discuter, le grand public repart avec des bouteilles, ce qui limite les frais pour les exposants. Le nom du salon évoque le slogan de Mai 68, sous les pavés la plage. L’atmosphère anticonformiste qui y règne correspond aux vignerons exposants. L’organisateur Antonin Iommi-Amunategui explique leur sélection : « ils doivent répondre à notre charte : vins naturels, bio, levures indigènes, pas d’intrants, pas de manipulation, éventuellement un peu de soufre. Et surtout, on goûte ». Il ne veut pas de vins déviants, mais des vins trop lisses peuvent être rejetés : « on aime la limite qui peut faire peur à d’autres » précise-t-il.
La marché des vins nature
L’organisateur* le reconnait, le marché des vins naturels arrive à un palier, la demande baisse, car il n’y a plus l’éclat de la nouveauté : « mais le naturel a des cartes à jouer, car il a la force d’attirer les personnes de 20 ans au vin ». Pour le bourguignon Oronce de Belair, c’est un marché dynamique : « Un marché de niche en quantité, mais dans les ouvertures de restaurants à Paris, une sur deux s’est faite avec une carte de vins nature. Le nature est dans l’air du temps, c’est un rempart contre la baisse de consommation du vin » déclare-t-il, lui qui est venu pour présenter ses bières, les « mousses sauvages » qui complètent son négoce de vins bourguignons La Maison Romane (Nuits-Saint-Georges) avant de conclure « il faut sauter sur ce qui marche ».
« Être nature à Paris, ça aide » rapporte Cameron Price, responsable commercial pour l’Île de France des vins alsaciens Achilée et Pépin, qui constate qu’« il n’y a pas si longtemps, les vins nature étaient très aléatoires dans les bars à vin, mais ce n’est plus le cas et ça va marcher de mieux en mieux ». Pour Virginie Aubrion, du château de Piote à Bordeaux, « le marché de niche continue, mais c’est un travail de titan. Il faudrait avoir des aides pour éduquer au vin ». Elle jalouse le monde de la bière qui a su faire la différence avec le terme « bière artisanale ».
Le prix et la transparence
Le coût d’élaboration des vins augmente. Antonin Iommi-Amunategui constate que dans son Glou Guide, le prix limite est passé de 15 à 20 € pour la huitième édition à paraitre fin août (ed. Cambourakis). Parallèlement Oronce de Belair observe que « avec la crise des ventes, beaucoup de gens réagissent quand ils voient les ventes baisser ou stagner, les cartes vont être redistribuées, car il n’y a plus de vin consommé en restauration ». Le coup d’œil n’est pas si diffèrent pour Béa Suszter, importatrice de vins hongrois (Le Boristic) pour qui « le nature n’est pas l’avenir, car en France, le premier critère pour un vin étranger demeure le prix ». Quant à Léa de Cazo, fondatrice de ORJI, agence spécialisée dans les hybrides et résistants, elle constate un rejet générationnel du vin conventionnel et de ce qu’il représente, à Paris, mais aussi dans les grandes villes : « le public est à la recherche d’authenticité et de transparence, dans le vin comme dans le mobilier ou l’alimentation. Le marché du vin nature est en train de prendre la place du traditionnel ».
* : Les prochains salons seront Mi-Livre Mi-Raisin les 6 et 7 décembre à Paris, les 1er et 2 novembre dans une nouvelle ville.