'indication géographique protégée (IGP) Cévennes n'est plus réservée aux vignerons du Gard. Fin 2024, l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) a étendu l’aire de production de vins cévenols à 40 communes lozériennes et créé une « zone de proximité immédiate » permettant aux caves coopératives de 29 communes ardéchoises de vinifier de l’IGP Cévennes à condition d’utiliser des raisins issus de vignes gardoises.
De quoi augmenter à court terme le potentiel de production de l’IGP Cévennes d’environ 5000 hl pour 93 hectares, soit 5% du volume et 6% des surfaces. « En 2025, environ 200 hectolitres de vin lozérien ont été revendiqués en IGP Cévennes, et ce n’est un début », salue Christel Guiraud, président du syndicat des vins IGP Cévennes, voyant dans la mesure « l’opportunité d’accueillir de nouveaux vignerons et des projets de diversification dans des terroirs à haut potentiel qualitatif. » En Lozère, le vignoble historiquement familial a commencé à se professionnaliser au début des années 2020 sous l’impulsion du domaine de Gabalie et du domaine des Cabridelle, à Ispagnac, dans les gorges du Tarn. A l’image de David Flayol, définitivement installé au Clos de la Rouvière depuis 2020 après une carrière dans le BTP, le sud du département pourrait accueillir 16 exploitations dans les prochaines années. « Nous sommes loin des 1000 hectares plantés dans les années 60 pour alimenter les mines d’Alès mais Il y a déjà eu 3 installations ces deux dernières années, la dynamique est lancée », se réjouit le vigneron, qui, comme ses confrères, ne rencontre aucunes difficultés pour commercialiser ses cuvées, « et ne vend pas une bouteille à moins de 10€ ».
Pour continuer à tirer son épingle du jeu, « s’adapter aux évolutions climatiques, sociétales, et se faire une petite renommée en jouant la carte de l’originalité », l’IGP Cévennes _ qui autorise déjà l’assemblage de 90 variétés_ a créé un observatoire des cépages en partenariat avec l’Institut coopératif du vin (ICV). « L’idée nous est venue en travaillant sur l’extension de l’aire de production quand nous avons découvert chez des vignerons des cépages originaux, oubliés, et même des hybrides interdits* pour lesquels la Fédération des vins IGP du Gard a obtenu à l'été 2024 l'autorisation de la Commission européenne de les commercialiser à condition de ne pas mentionner "vin" sur l'étiquette des bouteilles mais "jus de raisin fermenté" », retrace Jérôme Villaret, coordinateur de l’observatoire, qui prévoit aussi d’étudier des cépages inscrits au cahier des charges mais peu exploités, comme le villard blanc.
Ces prochains millésimes, des notations agronomiques et des microvinifications déboucheront peut-être sur une nouvelle modification du cahier des charges de l’IGP introduisant des cépages grecs, italiens ou portugais résistants à la chaleur et à la sécheresse, voire sur une évolution du catalogue officiel des variétés de vignes à raisins du cuve pour y inclure des cépages endémiques des Cévennes comme le négret de la Canourgue, ou l'aujaguet dont il ne reste plus que quelques dizaines de souches. « De quoi renforcer notre identité cévenole, se réjouit Christel Guiraud, Nous n’atteindrons pas le niveau de notoriété de Bordeaux demain, mais on peut rêver ! »
*le noah, le concord, l'isabelle, le jacquez, le clinton, le muscat bleu, et le baco noir sont interdits en France depuis 1934.