Difficultés de la filière à générer une performance économique pérenne, stable et ce depuis de nombreuses années… des difficultés économiques qui ne se traduisent que rarement par des défaillances brutales d’entreprises, mais plutôt à une dégradation d’indicateurs économiques : rémunération des exploitants, du foncier, vieillissement du végétal, du parc matériel… ». Consacré cette année à la filière viticole du bassin ex-Languedoc-Roussillon, le rapport Agriscopie 2024 du CerFrance et la Chambre d’agriculture Occitanie confirme sans détour les impacts de la crise traversée par le secteur sur les exploitations. 58 % des exploitations d’Occitanie étaient ainsi déficitaires en 2022.
Plus que riche en chiffres, ce rapport établi sur l’échantillon Cerfrance de 800 exploitations spécialisées en viticulture (dont plus de 90 % de produit brut est issu de la viticulture, sur 29 ha en moyenne exploitée, 73 % exploitants en cave coopérative et 27 % en cave particulière), dépeint les difficultés qui aboutissent aujourd’hui à « affaiblir structurellement le bassin viticole Languedoc-Roussillon sans permettre le renouvellement des générations ». Alors que la moitié des exploitations ont uniquement des chefs d’exploitations de plus de 55 ans, la viticulture, principale filière régionale, n’est choisie que par 16 % des nouveaux installés. L’âge moyen de ces derniers ne fait qu’augmenter, « 40 ans en moyenne, dans la fourchette haute en comparaison de l’ensemble des filières », pointe le rapport.
Une caractéristique forte de ce bassin de production est soulignée par 20 ans d’analyse de la part de CerFrance, qui le certifie, la taille ne fait pas tout, car « les exploitations performantes n’ont pas des surfaces plus importantes ». Des différences considérables sont enregistrées entre le secteur coopératif, « outil de lissage de la performance économique » qui stabilise l’excédent brut d’exploitation (EBE) à 1 530 €/ha sur les derniers millésimes, mais en deçà de la moyenne décennale de 1 653 €/ha du secteur de la coopération et celui des caves particulières. Seuls 3 des 10 derniers millésimes du secteur coopératif ont généré un résultat courant, pour un déficit de -438 € /ha en 2022.
Chez les coopérateurs, la valorisation est compliquée et la performance économique reste intimement liée au rendement. Les exploitations les plus performantes sortent 2 815 € d’EBE /ha à 66 hl/ha, contre 91€ d’EBE/ha pour les moins performantes à 29 hl/ha. Chez les caves particulières, en revanche, « la progression régulière de l’EBE a permis d’impacter favorablement un résultat courant en moyenne positif sur les 4 dernières années », pointe l’analyse. Ces caves particulières sont néanmoins très affectées par les charges et le fort impact de l’inflation sur les coûts de production. Malgré une production brute standard (PBS) moyenne en hausse de 1 121 € en 2022, l’EBE de ces caves particulières baisse de 32 €.


Chez les particuliers, plutôt que le rendement, c’est donc plus « la cohérence de la stratégie d’entreprise et la capacité à générer un important produit brut/ha » qui constituent les leviers de performance économique. Mais l’écart-type est conséquent chez les caves particulières, car on y trouve « les plus belles performances comme les échecs les plus retentissants », souligne le rapport.
Outre une stratégie ‘coût-volume’ « où la performance agronomique est le levier pour concurrencer des productions mondialisées de vins de cépage avec ou sans IG », CerFrance n’identifie que les stratégies de différenciation, qui génèrent de la valeur sur des productions à forte identité, pour bien valoriser une production en ex-Languedoc-Roussillon.
L’observatoire viticole 2023 de CerFrance Occitanie compile les charges de production (approvisionnements, services, impôts, main d’œuvre, frais financiers, amortissements) des exploitations particulières et de coopérateurs, relativement à la taille de leurs exploitations. En 2022, ces coûts de production ont représenté 98€/hl chez les coopérateurs, et 270 €/hl pour les caves particulières.
Chez les coopérateurs, les coûts moyens de production ont franchi le palier des 5000€/ha en 2022, (+14% en un an). Ce chiffre a dans le même temps atteint 11 400 €/ha pour les caves particulières (+19% en un an), en raison de la forte hausse du coût des approvisionnements (engrais, phytosanitaires, emballages…), à +30 %. « Cette augmentation pénalise les exploitations restées trop dépendantes des cours du vin » en vrac, souligne le rapport Agriscopie 2024. La production d’AOC, stratégie efficace en 2010, est aujourd’hui remplacée par 2 stratégies de valorisation de la production : une parfaite maîtrise du rapport coût-volume avec haute performance agronomique, soit une différenciation à forte identité.