e dernier mandat de Donald Trump aura sans aucun doute laissé un goût amer chez bon nombre d’exportateurs européens vers les Etats-Unis. Est-ce pour autant que son deuxième mandat doit susciter de nouvelles inquiétudes ? Abstinent invétéré, son hostilité à l’égard des produits importés est un secret de polichinelle. Dans son manifeste, il a d’ailleurs déjà déclaré son intention d’imposer des droits de douane allant de 10 à 20% sur l’ensemble des importations, quelles qu’elles soient, et de prioriser les produits fabriqués sur le sol américain. Hormis cette stratégie globale visant les importations, les vins européens en particulier sont-ils menacés, notamment par l’imposition de nouveaux droits de douane punitifs en cas de réélection de Donald Trump ? « Absolument. Il n’y a pas l’ombre d’un doute qu’il le fera et ils risquent d’être plus élevés que la dernière fois », déplore Michael Kaiser. « L’ancien Président Trump sèmera de nouveau le chaos à la Maison Blanche, à l’image de ce que nous avons observé lors de son premier mandat. La filière des boissons alcooliques sera prise dans le tourbillon de disputes qui ne la concernent pas ». Notons, par ailleurs, qu’à de maintes reprises, l’ancien Président américain a déclaré que les droits de douane sur les produits importés représentent, de son point de vue, l’une des principales solutions aux problèmes économiques des Etats-Unis.
Tentations sur un marché baissier
Face à lui, Kamala Harris, consommatrice de vins, californienne et membre d’au moins un club œnophile. Ces affinités pourraient-elles colorer sa politique vis-à-vis du secteur du vin ? « Je ne crois pas », estime Michael Kaiser. « En revanche, je pense qu’elle cherchera à mettre en œuvre des politiques qui vont favoriser les petites entreprises et par conséquent les petites entreprises vitivinicoles ». Dans le contexte d’un marché des vins qui régresse, des voix s’élèvent ces derniers temps au sein de la filière vitivinicole américaine pour critiquer la concurrence exercée par les vins importés. De là à imaginer des politiques favorisant la production locale au détriment des importations, il n’y a qu’un pas, que ne franchit pourtant pas le directeur de Wine America, seule association professionnelle nationale au service des vins aux Etats-Unis avec 500 membres. « Nous ne sommes pas favorables [à la réinstauration de droits de douane ou d’autres mesures qui pourraient porter atteinte aux vins importés] car ils créent des facteurs de distorsion du marché. De plus, nous ne voulons pas faire face à des mesures de rétorsion ». Comme l’a souligné Michael Kaiser dans une tribune récente sur les élections : « Les droits de douane imposés aux vins importés portent indirectement préjudice aux sociétés vinicoles américaines en fragilisant les grossistes sur lesquels elles comptent pour distribuer leurs vins ».
Un Président influent
Outre l’épée de Damoclès que représente le conflit Airbus-Boeing – qui doit revenir sur la table d’ici la mi-2026 – mais aussi les disputes récurrentes autour de la taxation des géants technologiques américains en Europe, d’autres dossiers pourraient toucher le commerce des vins aux Etats-Unis, à commencer par l’actualisation des recommandations alimentaires, prévue pour 2025. « Le Président a le pouvoir ultime de s'assurer que les agences fédérales suivent la voie qu'il souhaite leur voir emprunter », rappelle Michael Kaiser. « La Maison Blanche a la capacité d'influencer l'action des agences ».
And the winner is…
Autant dire que le choix de Président/e représente un enjeu majeur pour le commerce des vins outre-Atlantique, une importance qui fait dire au directeur de Wine America, « à titre personnel mais du point de vue des professionnels…je pense que la Vice-Présidente sera la Présidente « la plus favorable/moins préjudiciable » pour le secteur. Je pense que son administration continuera à ressembler beaucoup à l'administration Biden en termes de réglementations sur l'alcool, etc. On considère que la Vice-Présidente propose un programme réglementaire plus étoffé, mais si elle continue dans la lignée de l'administration Biden, le secteur du vin devrait bien se porter, dans l'ensemble ».