es élections législatives n’empêchant pas le mildiou de mettre sous pression le millésime 2024, le sénateur Hervé Gillé (Gironde, Parti Socialiste) interpelle le ministre de l’Agriculture sur « les raisons qui ont conduit la France à ne pas intégrer l'aléa sanitaire dans les conditions de soutien de la Politique Agricole Commune (PAC) et d'indemnisations du fonds de solidarité nationale (FSN) malgré l'autorisation réglementaire de l'Union européenne ». Dans une question publiée mi-juin, le sénateur alerte sur le cas des « viticulteurs qui souscriraient à une assurance climatique avec une complémentaire aléa sanitaire seraient doublement pénalisés puisqu'ils ne percevraient ni les subventions de la politique agricole commune (PAC - soit 70 % du montant des cotisations), ni l'indemnisation du fonds de solidarité nationale (FSN) sur les dégâts causés par les maladies cryptogamique ». Le non-déclenchement des nouvelles assurances multirisques climatiques (MRC, lancées en 2023) pour couvrir les pertes liées aux excès d’eau et aux dégâts de mildiou reste une déception dans la filière vin, où les risques pris pour réduire les doses de phytos ont pu être sanctionnés par la météo.
Hervé Gillé demande ainsi « à titre dérogatoire, pour une durée limitée et dans le cadre d'un protocole de réduction des traitements phytosanitaires [que l’Etat] puisse soutenir au titre de la PAC et indemniser au titre du FSN les pertes liées aux aléas climatiques et sanitaires*. Cela permettrait de mettre en place une véritable assurance multirisques pour les viticulteurs, telle que le prévoyait la réforme de l'assurance récolte. » Car dans l’immédiat, « les vignerons sont déçus d’avoir cru dans le contrat MRC » confiait récemment Joël Boueilh, le président des Vignerons Coopérateurs, notant que « ce qui devait être un progrès devient un recul assurantiel dans le Sud-Ouest, avec le développement d’autres contrats (paramétriques par exemple). On est à l’envers de ce que l’on voulait faire. Sans doute la moyenne olympique y est pour beaucoup. Vu le rendement moyen, il n’y a plus intérêt à s’assurer quand à l’étiage on récolte toujours au niveau de la moyenne olympique, quoiqu’il arrive. »


Si la question de la moyenne olympique n’est pas reprise dans la question du sénateur, elle irrigue les débats sur le bilan de la nouvelle MRC. Dans le récent rapport parlementaire sur "la refonte du système assurantiel agricole : évaluation de l’assurance-récolte" piloté par le député Pascal Lecamp (MoDem, Vienne), il apparaît que les vignes assurées ont bondi de 15 % en 2023 par rapport à 2022 (passant en un an de 246 500 à 283 400 hectares). Avec 37,4 % des surfaces viticoles sous MRC en 2023 (plus 5 points en un an), l’objectif de 60 % de couverture en vigne semble difficile à atteindre avec le poids de la moyenne olympique. Lors de son audition, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau reconnaît que « la question de la moyenne olympique se pose, car […] un agriculteur ayant subi quatre années de gel, de grêle et de sécheresse ne recevra pas grand-chose ; les aides sont classées par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans un système [dont] l’Union européenne fait une application stricte ; plutôt que d’essayer d’obtenir une modification de ce système – nous aurions sans doute plus à y perdre qu’à y gagner – notre stratégie est de demander à la Commission […] de permettre aux États membres […] d’allonger par exemple la période de référence à huit ans ; […] nous pourrons avancer avec certains [ministres d’autres pays] ».
Du moins si le prochain gouvernement garde ce cap après les législatives 2024... Le cabinet du sénateur Hervé Gillé précise que « la question sera bien redéposée en cas de changement de gouvernement ».
* : Ce qui rappelle le dispositif d’assurance maladie cryptogamique actuellement réfléchie et testée par la région Nouvelle-Aquitaine.