Newsletters
Magazine
Article réservé aux abonnés 
Les paysans ont la peau épaisse, mais il y a des limites... » soupire Éric Chadourne, le président de l’Interprofession des Vins de Bergerac et de Duras (IVBD). Sur les 9 500 hectares de l’AOC Bergerac, 2 264 ha ont été dévasté de 20 à 100 % par l’orage de grêle du 5 mai dernier, pour un millier d’hectares dévasté et « des exploitations entières touchées et à plat » rapporte le viticulteur de Pécharmant. Ayant touché un secteur très viticole (600 ha sur la commune de Pomport, 425 ha sur Gageac et Rouillac, 349 ha à Saint-Laurent-des-Vignes…), les grêlons sont tombés après le gel (localisé) et avant le mildiou (en voie de généralisation). Ce dernier ayant été alimenté par les fortes pluies et les températures élevées : « c’est une vraie boîte de Petri » résume Éric Chadourne, qui note un développement du mildiou encore plus précoce qu’avec le millésime 2023.
Rappelant les mauvais souvenirs de l’an dernier, cette pression mildiou alimentée par une météo « tropicale humide » ne fait pas encore trop de dégât, les vignes n’ayant pas beaucoup poussé note le président de l’IVBD. Mises à mal économiquement par la succession d’aléas climatiques (sans forcément le déclenchement de l’assurance climatique, comme l’an passé avec le mildiou), les exploitations viticoles n’ont pas le moral rapporte Éric Chadourne, évoquant des vignerons fatigués par la succession des traitements ce début de campagne. En terme de produits phytosanitaires, de fuel et de main d’œuvre, c'est une deuxième année fortement consommatrice à financer : « c’est critique. Je suis très inquiet, il y a du découragement dans l’air avec la pression mildiou. Et je ne suis pas d’un naturel pessimiste » pointe-t-il. Pour sortir la tête de l’eau, « je crois qu’il va falloir réinventer des outils de protection, physique (contre le gel, la grêle…) et de résilience des exploitations » note le viticulteur, appelant à « revoir la fiscalité et la protection sociale » du vignoble. Appelant à trouver un système plus efficace que la Déduction pour Épargne de Précaution (DEP), Éric Chadourne pointe que pour activer cet outil, il faut de la trésorerie : comme pour le Volume Complémentaire Individuel (VCI) qui demande de la récolte. Sans trésorerie pour amorcer une DEP ni de récolte abondante pour constituer un VCI, les vignobles sont dans l'impasse prévient-il : « ça ne fonctionne plus ».
Payant « plein pot » les cotisations MSA et les impôts sur les performances commerciales de l’an passé sans prise en compte du trou de production qui va rapidement peser sur leur activité, les exploitations viticoles n’ont plus les trésoreries permettant de suivre « il y a une augmentation de l’endettement des exploitations qui est très inquiétante. On ne pourra plus s’en sortir avec le système financier tel qu’il est » prévient Éric Chadourne, qui ne cache pas qu’à l’abattement sous les difficultés pourrait succéder la colère et les manifestations comme au début d’année.
