es 33 exposants du salon Vinapogée sont venus de toute la France ce 15 janvier à Paris, accompagnés de quelques européens avec une majorité d’habitués, comme Pierre Gassmann, apôtre s’il en est des vieux millésimes. Il présentait cinq vins, le plus jeune de 2011 et le plus ancien un gewurztraminer 1996. Ces cuvées sont à la vente, ce qui n’est plus le cas de la plupart des exposants, alors que c’était la base à la création du salon.
Hervé Bizeul explique comment il a eu l’idée de ce salon : « C’était lors d’un des derniers salons Vinexpo à Bordeaux, j’étais énervé car on parlait de grands vins sur les vins de l’année. J’ai pensé que si d’autres vignerons comme moi avaient gardé volontairement du stock, on pourrait les présenter ». Cela s’est fait en 2015 avec quelques amis vignerons, dans les salons de l’hôtel Bristol à quelques semaines de Noël, sous le nom de "Salon des vins matures", non sans une pointe d’espièglerie vis-à-vis des vins « nature ». Hervé Bizeul a ensuite passé la main à David Hairion, qui avec son agence de publicité, était plus à même de développer le concept. Il a choisi le nom Vinapogée.
Vigneron au Clos des Fées à Vingrau en Roussillon depuis 1997, Hervé Bizeul a été confronté aux vins matures au début de sa carrière. Celui qui fût meilleur sommelier de France se souvient : « En 1978 en Bourgogne les vignerons proposaient des 69 et il y avait plusieurs millésimes à la vente. Les vins n’étaient pas chers, les vignerons avaient moins d’égo ». Il a aussi travaillé avec Nicolas et a participé à leurs séances de rebouchage de vieux millésimes et le déménagement de la cave de Charenton.
« Je n’ai pas envie de boire un Saint-Joseph de l’année au restaurant, on est passé à côté des bourgognes 2005 qui ont été vendus aussitôt mis en vente, c’est une honte » se plaint Hervé Bizeul. Ce n’est pas si compliqué pour le vigneron de garder un peu de stock, il suffit de le vouloir et de gérer. Lui ajoute généralement 5 % par an. « Si je dis que mon terroir est grand et que mon vin vieillira, je dois le prouver. Je pense qu’un jour les clients paieront plus cher pour un vin mûr. Les vins glou-glou on peut les faire n’importe où alors qu’un alsace de Deiss est une œuvre à part entière, un vrai plaisir mental. C’est bien d’être différent et cela créée de la valeur » poursuit-il.
L’édition 2024 de Vinapogée a accueilli 502 dégustateurs, dont une majorité de grands amateurs (278), des sommeliers, cavistes, restaurateurs (206) ainsi que quelques journalistes et influenceurs. Des chiffres proches de 2023, avec un peu plus d’amateurs. David Hairion conclut : « un vin à maturité a un supplément d’âme, nous voulons que cette connaissance survive et défendre l’idée que le vin est un objet de culture ».