Le démembrement de propriété, qui consiste à séparer l’usufruit de la nue-propriété, est intéressant pour préparer sa transmission ou pour faire de l’optimisation fiscale lors de l’acquisition d’un domaine. Dans ce dernier cas, le preneur peut garder la nue-propriété et donner l’usufruit à la société d’exploitation. On peut pratiquer le démembrement de propriété pour du foncier et pour les parts d’une société viticole. Au terme du démembrement, c’est-à-dire au décès de l’usufruitier ou à l’extinction de l’usufruit temporaire, le nu-propriétaire devient plein propriétaire des parts.
Le démembrement de propriété permet de décoter la valeur d’un bien et donc de pouvoir en transmettre davantage sans payer de droits de succession. On tient compte de l’âge du donateur pour calculer la valeur de la part transmise. Si le donateur a 55 ans, la valeur de l’usufruit et de la nue-propriété est de 50 % chacune. S’il a 65 ans, la valeur de l’usufruit est de 40 %. Les gains peuvent être importants. Prenons l’exemple de parents âgés de 58 ans souhaitant transmettre 800 000 € de foncier à leurs deux enfants. Avec le démembrement, la nue-propriété vaut 400 000 €. S’ils n’ont pas fait de donation dans les quinze dernières années, chaque parent peut transmettre 100 000 € à ses enfants, sans droit à payer. Dans ce cas, ils peuvent donc tout transmettre sans payer aucun droit. Et si le foncier est inclus dans un GFA et loué avec un bail à long terme, une décote de 75 % jusqu'à 300 000 € est appliquée sur la valeur des terres.
En règle générale, je déconseille de faire des donations de nue-propriété avant 50 ans car l’avenir professionnel des enfants est rarement bien établi. C’est surtout vrai pour les parts de sociétés viticoles. Pour le foncier, c’est moins gênant. La tranche d’âge 50-60 ans est particulièrement indiquée car on a une vue sur l’orientation des enfants, et il sera encore probablement possible de faire une nouvelle donation dans quinze ans.
Il est beaucoup plus utilisé pour la transmission du foncier car c’est plus simple. On peut facilement être dix personnes à détenir du foncier sans travailler sur le domaine. Être associé d’une société d’exploitation viticole, c’est participer à la vie de l’entreprise et donc y travailler même partiellement. C’est beaucoup plus engageant et impactant. En clair, partager de l’argent, c’est facile, mais partager le travail, c’est plus compliqué.
C’est l’une des craintes de ceux qui donnent, et c’est légitime. Dans le cas des sociétés, on peut mettre à jour ses statuts avant la donation pour mentionner que les usufruitiers peuvent participer au vote lors des AG et décider de la distribution des dividendes ordinaires et extraordinaires. Si rien n’est fait, c’est le code civil qui prévaut. C’est alors l’usufruitier qui bénéficie des droits ordinaires ; c’est lui qui perçoit les revenus de l’année. Le nu-propriétaire, pour sa part, bénéficie des droits extraordinaires : c’est lui qui perçoit les revenus d’une cession et de distribution de réserve.
Transmettre, c’est penser à sa mort, et c’est trop difficile pour certains. On voit aussi des personnes qui appréhendent de se dessaisir de leur patrimoine ou de leur pouvoir. Cela peut se comprendre dans certains cas car la retraite agricole est faible.