À la suite de mon rapport, nous avons obtenu dans la dernière loi de Finances l’augmentation de 300 à 500 000 € du seuil d’exonération fiscale à 75 % pour les droits de mutation à titre gratuits des biens donnés à bail rural à long terme (sous condition de conservation du bien pendant 10 ans). Certes, ce n’était pas exactement ma proposition, mais c’est une nette avancée. Ce rehaussement permet déjà d’améliorer les droits de mutation pour ceux transmettant leur foncier. Après la présentation de mon rapport aux ministres de l’Agriculture et du Budget [NDLR : fin 2022], la DGFIP prévoit des essais pour écarter les achats hors normes du calcul du prix moyen des vignes [NDLR : pour que la spéculation foncière n’aboutisse pas à des prix déconnectés de la réalité des exploitations, et à des redressements fiscaux].
En juin 2023, la synthèse des concertations régionales et nationales sur la nouvelle loi d’orientation et d’avenir agricole reprennent des propositions identiques à mon rapport sur le volet "transmission et installation". J’ai proposé de mettre en place un outil de portage du foncier : de créer un Groupement Foncier Agricole/Viticole (GFA/GFV) copiant le modèle du Groupement Forestier d’Investissement (plus ouvert, avec un accès à l’épargne publique, des associés ayant une responsabilité limitée selon apports, sans limitation des encours ou du nombre d’actionnaires…). Cette proposition a été reprise dans le projet de pacte d’orientation et d’avenir, de façon à inciter les investisseurs à porter temporairement le foncier pour les repreneurs n’ayant pas la surface financière.
Et pour le prochain Projet de Loi de Finances (PLF) ?Je porte un amendement pour aligner sur le pacte Dutreil le dispositif fiscal de la transmission à titre gratuit des biens loués par bail à long terme. Soit une exonération de 75 %, sans limite de plafond (avec un engagement de 25 ans de conservation, et non de détention, permettant la transmission). On alignerait le dispositif sur celui applicable aux transmissions d’entreprises. Je m’y suis pris de très bonne heure pour porter cet amendement et sensibiliser les acteurs : il n’y a pas eu de refus d’emblée. Il y a un alignement sur les recommandations de la loi d’orientation et d’avenir agricole. Il faut traiter le sujet. Ce n’est pas un pari pour moi, il faut qu’à un moment on aide la transmission pour préserver l’excellence viticole et au-delà notre modèle agricole.
On entend dans la filière viticole, notamment AOC, d’autres demandes d’allégements, comme porter à 85 % l’exonération sur la transmission du bail à long terme en contrepartie d’un engagement d’affectation des biens à l’exploitation pendant au moins 18 ans…
Demander un abattement à 85 %, ça créée une niche fiscale. Ça ne passera jamais, je ne le défendrai pas. Il faut aller étape par étape, en se focalisation d’abord sur ce qui est discriminant. Mon objectif est d’harmoniser le pacte Dutreil sur les outils exploitation. Longtemps, on a considéré que le foncier n’était pas un outil d’exploitation, mais du patrimoine. Ça ne tient plus face à la pression du foncier et l’envolée des prix. L’exonération des droits de mutation permet de laisser la capacité aux exploitation de financer leurs mutations environnementales, commerciales… Il y a beaucoup de transitions, qui causent des charges considérables. Il faut soulager la fiscalité pour allouer des fonds à l’évolution de l’outil de travail.
Je propose une harmonisation pour avancer : c’est crucial pour maintenir le milieu agricole, pour transmettre l’exploitation, pour dégager de la croissance et pour soutenir l’indépendance stratégique. Je me concentre sur l’essentiel : pour la pérennité, c’est la transmission. Le but est de donner de la libéralité aux exploitations sur l’avenir de leur outil. La transmission est un enjeu majeur.