a naissance d'un nouveau label ? L’organisme anglo-saxon certificateur A Greener World (AGW) promeut des solutions pratiques et durables dans le monde agricole autour de cinq certifications : « Bien-être animal », « Nourri à l’herbe », « Sans OGM », « Naturel/Organique » et « Agriculture régénérative ».
C’est à cette dernière que la famille Gassier adhère, emmenée par l’énergie de la fille cadette, Isabel, installlée avec son père depuis 2021. Les vignes du château de Nages et du domaine Gassier, menées en agriculture biologique depuis 2007, sont certifiés « Agriculture régénérative » par AGW depuis le mois d’octobre 2023. Entre 2011 et 2017, Isabel Gassier, alors responsable de vignobles bio à Sonoma et Nappa Valley, apprend ces techniques, voguant entre agroécologie, polyculture, régénération de la biodiversité.
Michel Gassier, le père d’Isabel, vigneron depuis 40 ans sur le domaine, explique : « l’agriculture régénérative est une approche globale et complète. Elle ne se met pas en opposition avec d’autres types d’agriculture comme l’agriculture de conservation des sols, l’agriculture bio, etc. C’est une approche large et complète qui croise les pratiques et les compétences. Parfois on peut s’y perdre. La certification amène un cadre dans la priorisation des objectifs. » Et d’ajouter « C’est également une méthode qui permet de mesurer nos progrès, elle amène une obligation de résultat et non pas de moyens. »
AGW a demandé à la famille Gassier de réaliser un plan de ferme en cohérence avec l’agriculture régénérative et en adéquation avec la nature et les typicités de leurs parcelles. Les indicateurs, les mesures et les objectifs ont ensuite été transmis. Un échange a été instauré autour du réalisme des objectifs et des ambitions de l’entreprise. Un jury composé d’agriculteurs a par la suite analysé le projet présenté puis s’est déplacé sur le terrain pour constater, et valider la certification. Un audit à lieu chaque année pour remettre celle-ci à jour.
« A l’heure du green-washing, la certification donne plus de crédibilité à ce que l’on a décidé d’entreprendre » explique le viticulteur. Depuis le retour d’Isabel en 2021, les vignerons ont déjà mis certaines pratiques comme la diminution du travail du sol (moins de 40% des parcelles sont travaillés) au profit de semis direct ou de tonte dans le rang et dans l’inter-rang, l’installation de nichoirs, l’installation de haies indigènes, mellifères et de fruitiers, le choix de porte-greffes plus vigoureux, résistants à la sécheresse, offrir aux bergers des pâturages nourriciers, produire 600 tonnes de compost maison, la revitalisation d’un cour d’eau…
Si pour Michel Gassier le défi est à relever sur les 5, 10, 15 années à venir, il aime rappeler que pour sa fille « c’est le projet d’une vie ». En effet, la certification demande de pouvoir rassembler des connaissances sur une somme de domaines différents. C’est pour cela que les échanges entre professionnels sont précieux. « Certains sont des experts du couvert ou d’autres de l’agroforesterie, il est donc important de s’inspirer et d’échanger avec ces professionnels », rappelle-t-il. En plus des connaissances, cela demande de nouveaux investissements, de nouvelles adaptations de matériel. Cela demande également de savoir communiquer et transmettre autour de ces pratiques.
« Au début, lorsque l’on expliquait notre démarche aux gens, on les perdait tant le sujet est vaste. Désormais, cela fait un an et demi que l’on travaille sur la communication et sur la synthèse de nos arguments et de nos projets. Les gens sont très intéressés et nous arrivons à communiquer plus efficacement » affirme Michel Gassier. De plus, la famille a mis en place un parcours d’environ 1,5 km, illustré de panneaux entre vigne, forêt et cour d’eau. Il est installé sur la parcelle la plus avancée sur ce vers quoi veut tendre le domaine dans les années à venir. Les écoles, les passants, les clients peuvent le parcourir.


Mais la transmission est aussi intra familiale comme l’explique ce père comblé : « j’aime expérimenter, et je me suis dit, après 40 ans de métier, que je voyais mon métier être réinventé par les viticulteurs de demain. Ma fille m’a fait écouter et lire des choses sur l’agriculture régénérative et lorsque j’allais en Californie elle me montrait des parcelles menées de la sorte. J’ai toujours pensé que les nouvelles générations, lorsqu’elles s’installent, ont quelque chose à apporter, de la fraicheur dans les projets. Elle pilote, et moi je lui amène mon expérience des vignes. ». Et d’ajouter avec philosophie « Et puis avoir un projet avec sa fille, c’est royal ! Dans ma famille, on a toujours dit que les domaines ne nous appartiennent pas, on est juste les gardiens de l’entreprise du temps de notre génération et après on passe la main. Idéalement on le fait fructifier et on essaie de le donner à la génération suivante dans le meilleur état ! »